jeudi 22 octobre 2020

Enver Paşa (Enver Pacha) dans les souvenirs du maréchal Hindenburg



Paul von Hindenburg, Aus meinem Leben (Ma vie), Paris, Charles-Lavauzelle, 1921 :


"En somme, je me croyais en droit d'espérer que notre alliance avec la Bulgarie nous apporterait, un jour, quelque soulagement au point de vue militaire.

La confiance que j'avais dans la Turquie n'était pas moins grande. L'Empire turc était entré dans la lutte sans la moindre ambition d'agrandir sa puissance politique. Ses personnalités dirigeantes, avant toutes Enver-Pacha, avaient clairement reconnu que, dans la lutte qui avait éclaté en 1914, il ne pouvait être question de neutralité pour la Turquie. On ne peut guère s'imaginer que la Russie et les puissances occidentales auraient observé éternellement les mesures restrictives concernant l'utilisation des Détroits. Entrer dans le conflit était, pour la Turquie, une question de vie ou de mort, presque plus nette que pour nous autres. Nos adversaires nous rendirent service en le déclarant dès le début hautement et clairement.

La Turquie avait manifesté, dans cette lutte, une puissance qui avait étonné le monde entier. L'énergie avec laquelle son commandement avait dirigé les opérations avait surpris amis comme ennemis ; elle immobilisait, sur tous les théâtres asiatiques, des forces ennemies importantes. En Allemagne, on a souvent reproché au grand quartier général d'avoir dispersé ses propres moyens pour renforcer la force combative de la Turquie. Mais ceux qui professent cette opinion oublient qu'en soutenant la Turquie nous lui avons permis de maintenir loin des théâtres d'opérations de l'Europe centrale plusieurs centaines de milliers de combattants appartenant aux meilleures troupes de nos adversaires." (p. 151-152)

"Je fis également connaissance à Pless, au cours de l'automne et de l'hiver, avec les chefs militaires de la Turquie et de la Bulgarie.

Enver-Pacha montra, vis-à-vis de moi, une largeur et une liberté de vues peu communes dans la question de la conduite et de l'exécution de la guerre actuelle. Le dévouement de ce Turc à notre cause commune, cause si grande et si grave, fut sans limite. Je n'oublierai jamais l'impression que me fit le vice-généralissime turc lors de notre premier entretien, au début de septembre 1916. Sur ma demande, il nous exposa, alors, la situation militaire de la Turquie. Avec une clarté, une décision et une franchise remarquables, il nous en fit un tableau détaillé, et, se tournant vers moi, il conclut en disant :

« En Asie, la situation de la Turquie est, sur certains points, difficile. Il nous faut craindre d'être encore refoulés en Arménie. Il se peut aussi que les combats reprennent bientôt en Mésopotamie. Je crois également que les Anglais seront en état de nous attaquer d'ici peu en Syrie avec des forces supérieures. Mais, quoi qu'il arrive en Asie, la guerre se décidera en Europe, et, dans ce but, je mets à votre disposition toutes mes divisions encore disponibles. »

Jamais un allié n'a encore parlé de façon aussi objective et aussi peu égoïste à un autre allié.
Et Enver-Pacha ne s'en tint pas à des paroles.


Bien que possédant une conception élevée de la guerre en général, Enver-Pacha manquait d'instruction militaire, je pourrais dire d'instruction du service d'état-major. Désavantage que l'on rencontrait manifestement chez tous les chefs et dans tous les états-majors turcs [un des legs funestes du long règne d'Abdülhamit II (qui se méfiait énormément des officiers diplômés), dont le régime était basé sur le favoritisme et la corruption]. Nous eûmes l'impression qu'il s'agissait là d'un défaut naturel des Orientaux. L'armée turque paraissait ne posséder que peu d'officiers connaissant le rôle technique que devait jouer le commandement pour réaliser des opérations bien conçues. On n'avait pas, dans cette armée, la notion que c'était une nécessité pour l'état-major de s'occuper de tous les détails en même temps que des grandes idées stratégiques. Il en résultait que la richesse de pensée de nos alliés orientaux demeurait souvent improductive, parce qu'au point de vue militaire ils n'avaient pas le sens de la réalité." (p. 160-161)

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vendredi 2 octobre 2020

Les critiques militaires du général Hüseyin Hüsnü Emir Erkilet



"Pologne et Dantzig", Bulletin périodique de la presse turque, n° 130, 4-6 septembre 1939, p. 12 :


"Le général en retraite Erkilet étudie, dans Son Posta du 11-8, la question de Dantzig.

...Il ne reste au Reich qu'à choisir entre deux solutions : renoncer à ses revendications ou prendre en considération qu'il lui faudra combattre sur deux fronts s'il s'avisait de s'emparer par la force des territoires réclamés. Or, jusqu'à présent, le Reich n'a adopté aucune de ces deux solutions.
"


"Les troupes finlandaises maintiennent intactes leurs lignes de défense : Les pièges à mines ont fait une hécatombe de tanks soviétiques", Beyoğlu, 4 décembre 1939, p. 1 :


"LE MOUVEMENT TOURNANT SOVIETIQUE

Dans un remarquable article qu'il a publié dans le « Son-Posta » d'hier le général Hüsnü Erkilet écrit notamment :

« L'armée soviétique qui, entre le lac Ladoga et le golfe de Finlande, a avancé jusqu'à la ligne fortifiée Mannerheim a tenté de la déborder par un mouvement tournant, au Nord du lac Ladoga. Elle s'efforce aussi de neutraliser la ligne en question en débarquant en arrière de celle-ci, par le Sud, à 40 km. au Sud de Viborg (Viipuri) et à droite en arrière de la ligne fortifiée, au petit port de Bjorkö ou Koivisto. Le fait est que ces positions ne pourront pas être réduites si elles ne sont pas contournées. Mais, suivant les nouvelles de source finlandaise, tous les mouvements tentés par la flotte soviétique le long du littoral du golfe de Finlande ont été neutralisés et arrêtés. De même, au Nord du lac Ladoga l'action soviétique s'est heurtée à une violente résistance.

... La Russie Soviétique cherche à miner la Finlande non seulement militairement mais aussi politiquement. C'est pourquoi elle a proclamé qu'elle ne reconnaît plus le gouvernement finlandais légal. Les Russes reconnaissent, par contre le gouvernement de pantins créé par eux à Terijoki, localité qu'ils ont occupée le second jour des opérations.

Bref, la Finlande lutte aujourd'hui pour son indépendance et sa liberté et l'opinion publique du monde entier est de son côté. On ne saurait prévoir dès à présent le résultat de cette lutte et l'on ne saurait dire qu'une petite nation de 3,7 millions d'habitants est condamnée à être vaincue à tout prix par une nation de 170 millions d'habitants. Il y a en effet beaucoup d'éléments naturels que moraux qui combattent pour la Finlande. » "


"La guerre de Finlande ne sera ni une promenade militaire ni une guerre-éclair : Un remarquable article du général Erkilet", Beyoğlu, 6 décembre 1939, p. 1 :


"Le général Hüsnü Emir Erkilet écrit dans le « Son Posta » d'hier :

« La Finlande peut tout perdre, sauf l'honneur » ; ce sont là les paroles du commandant en chef des forces finlandaises, le général Mannerheim. Mais je suis sûr désormais que tous les officiers finlandais, tous leurs soldats et la nation entière pensent et sentent comme lui. S'il en eut été autrement, ni la petite Finlande n'eut osé envisager une guerre contre la grande Russie, ni elle n'aurait opposé sa résistance actuelle à un adversaire plusieurs fois plus fort qu'elle.

Le bilan des opérations


Voici le cinquième jour également de guerre russo-finlandaise qui s'est écoulé : la Finlande est toujours debout. Le communiqué du grand quartier général soviétique lui-même annonce que tout ce que l'on a pu prendre en 5 jours, ce sont les 2 petites îles de Suursari et Lavansari et quelques récifs dans le golfe de Finlande, ainsi que quelques kilomètres de territoire évacués volontairement par les Finlandais en se repliant sur leurs lignes fortifiées. Toujours d'après le rapport russe, la plus grande avance réalisée par les Russes dans la région au Nord du lac Ladoga est de 40 km.

On voit donc que tout ce que l'armée russe est parvenue à réaliser en 5 jours de bataille, c'est la conquête du terrain laissé par les Finlandais en avant de leurs lignes — avance qui ne saurait avoir aucune influence sur le cours de la guerre. Et cette avance, pourtant si restreinte, a été réalisée au prix de pertes très lourdes infligées aux Soviéts par les arrières-gardes finlandaises qui reculaient pas à pas en réalisant de redoutables concentrations de tir, en utilisant très habilement les accidents du terrain et les constructions, en faisant un emploi intensif des mines et des pièges à tanks.

Nos frères Finlandais ont réalisé dans l'isthme, au Nord du lac de Ladoga et enfin dans l'Extrême Nord, dans la zone de Petsamo une résistance et des mouvements militaires magnifiques. Ils se battent comme des Turcs.

La perte de Petsamo, après sa brillante reconquête, ne saurait avoir la moindre influence sur la résistance générale de la Finlande. Et je ne crois pas que les Finlandais commettent l'erreur stratégique des Polonais, qui consiste à défendre avec des forces importantes des objectifs d'une portée purement locale. Un soldat expérimenté comme Mannerheim ne ferait pas cela ! C'est pourquoi nous pouvons attribuer la résistance finlandaise à Petsamo à l'opposition des forces locales et à la réaction follement téméraire de la population. Nous apprenons que dans l'isthme, les Finlandais combattent encore devant leurs positions principales. Etant donné que celles-ci sont à 30 ou 40 km. à l'ouest de la frontière et que le champ battu par leur artillerie est d'au moins 10 km. nous en déduisons que les Russes, ici, ils n'ont même pas avancé de 20 km.

Conclusions d'ensemble

Il résulte de tout cela que l'armée finlandaise est excellente et les stratèges qui la dirigent sont à la hauteur de leur tâche. Le sentiment qu'ils défendent leur existence nationale anime, par surcroît, les combattants finlandais et en fait une force qu'il ne serait pas facile de vaincre. Helsinki peut être anéantie par les bombes d'avions ; les belles villes finlandaises, les fabriques et les oeuvres de culture et de civilisation peuvent servir d'aliment aux bombes incendiaires. Mais l'on voit que l'armée finlandaise et le moral du peuple finlandais ne sauraient être ébranlés par de pareilles choses.

En tout cas la guerre de Finlande ne sera ni une promenade militaire ni une guerre-éclair. Même si les Finlandais doivent être finalement vaincus, cette guerre sera très sanglante et très longue. C'est pourquoi il est impossible d'en prévoir dès à présent le développement et l'issue. Si cette guerre s'aggrave, elle pourra avoir des conséquences très désagréables. Il convient donc d'attendre, pour en connaître les développements ultérieurs et voir quelle sera l'ampleur de l'aide que la Finlande pourra recevoir des pays scandinaves.

Le côté moral

Le recours du gouvernement finlandais à la S. D. N. a une valeur surtout politique. Il ne saurait avoir aucune influence pratique ni sur la résistance finlandaise, ni sur les plans d'agression et de conquête actuelle de la Russie. Mais ce n'est évidemment pas une petite chose que d'obtenir une bonne presse dans le monde entier, de conquérir les coeurs et les esprits. C'est même là beaucoup, pourrait-on dire....."


"L'opinion du général Erkilet : Les Alliés doivent se hâter", Beyoğlu, 16 avril 1940, p. 1 :


"Commentant l'attaque anglaise contre Narvik, le général H. E. Erkilet constate dans le « Son Posta » que la destruction des destroyers allemands ne suffit pas. Une fois ces forces navales mises hors de cause, il faut y débarquer des troupes et capturer les troupes allemandes qui s'y trouvent isolées.

« Toutefois une action des Alliés en ce sens même couronnée de succès ne saurait avoir une répercussion décisive sur les destinées de la Norvège et sur celles de la guerre. Car Narvik est à l'extrême Nord de la Norvège. Et par dessus le marché, il n'existe même pas de routes qui relient ce port au Sud. C'est à dire que le territoire norvégien ne peut être conquis en partant de Narvik ni débarrassé de troupes allemandes. Néanmoins, en se rendant maîtres du coin septentrional du pays, les Alliés pourront offrir aux Norvégiens un point d'appui moral. En outre, c'est là une excellente base aérienne et navale pour des opérations ultérieures vers le Sud, dans la direction de Trondheim et Bergen... »

Le chroniqueur militaire de l'importante feuille du soir constate que les Allemands ont dû certainement recevoir beaucoup de renforts, ce qui explique l'extension de leur occupation dans la région de Christiansand et d'Oslo. Il sera plus difficile d'en faire parvenir aussi aux garnisons qui tiennent Bergen et Trondheim. C'est qui ne signifie pas que cela soit impossible, notamment par voie de mer et par voie aérienne.

C'est pourquoi, conclut le général H. Erkilet, les Alliés doivent se hâter."


"Les troupes alliées, écrit le général Erkilet, ont inscrit une page brillante dans l'histoire militaire", Beyoğlu, 31 mai 1940, p. 1 :


"Dans son bulletin quotidien du « Son-Posta », le général Hüsnü Emir Erkilet écrit :

La situation ne présente pas de changements notables. La plus grande partie des troupes alliées qui, sous le commandement du général Blanchard reculent vers la mer, ont créé une ligne de résistance qui va, en Belgique, depuis Nieuport à l'ouest d'Ostende le long de l'Yser, passe au nord d'Ypres et atteint Gravelines par Cassel et Wormhond.

La localité de Bailleul, au sud de la ligne Cassel-Ypres, qui est occupée par les Alliés, vraisemblablement en vue d'établir le contact en direction de Lille a été réduite par des attaques déclenchées par les Allemands de part et d'autre de la ville. Les Allemands annoncent qu'à cette occasion des éléments alliés ont été encerclés.

Suivant les Allemands, les Alliés ont continué à se rembarquer à Dunkerque à la faveur de la nouvelle ligne qu'ils ont constituée, mais en s'exposant aux attaques aériennes allemandes.

Les Allemands annoncent aussi que, sur la Somme, une attaque des chars armés français a été repoussée. Des concentrations alliées ont été bombardée et mitraillées au sud-ouest d'Amiens, dans des forêts.

COUP D'OEIL D'ENSEMBLE


La constitution par les Alliés d'un nouveau front adossé à Dunkerque et appuyé sur le flanc par l'Yser et sa défense énergique présentent deux avantages considérables :

1. — Elle permet aux forces devant se rembarquer de le faire autant que possible en bon ordre et avec peu de pertes.

2. — Elle permet de retenir un grand nombre de forces allemandes sur le front du nord et offre au général Weygand la possibilité de gagner du temps pour procéder à ses regroupements et à ses concentrations dans le sud.

Nous ignorons dans quelles conditions les Alliés ont constitué ce nouveau front et quelles sont les forces chargées de le maintenir. En tout cas le fait qu'ils aient pu maintenir ici la liaison avec l'Angleterre constitue pour eux un grand avantage. Que les armées du général Blanchard aient pu constituer un couloir, depuis la zone de Valenciennes jusqu'à la mer et opposer, sur tout ce parcours, un mur aux attaques violentes venant de l'Est et de l'Ouest, c'est là un événement sans précédent dans l'histoire. Cette opération est d'autant plus remarquable qu'elle s'est produite après la reddition de la Belgique.

Les forces alliées ont inscrit ainsi dans l'histoire militaire une page honorable et pleine d'enseignements."


H. Emir Erkilet, Son Posta, 10 décembre 1940 :

"L'armée grecque [résistant à l'invasion italienne] a arraché l'admiration du monde entier. Elle peut être fière d'elle."


"Chronique militaire : L'invasion de l'Angleterre est-elle possible ? Par le général H. E. Erkilet", Beyoğlu, 11 août 1941, p. 1 et 4 :


"Le général H. Emir Erkilet écrit dans le « Cumhuriyet » :

L'été dernier, les Allemands avaient percé, brisé et mis en pièces avec une si grande et si étourdissante rapidité les fronts de Hollande, de Belgique et de France, qu'après la reddition des deux petits pays de l'Europe nord-occidentale, la France elle-même s'était vue dans l'obligation de déposer les armes. Toutefois, en dépit du fait que les dix divisions (environ 150.000 hommes) que l'Angleterre avait envoyées en France septentrionale et en Belgique fussent totalement défaites et se fussent réfugiées de Dunkerque dans la mère-patrie, elle ne s'est pas rendue à l'époque et, depuis, elle n'a pas renoncé à la volonté de continuer la guerre.

Dunkerque

Cela est dû au fait que l'Angleterre est une île et qu'elle dispose d'une flotte extrêmement puissante.

L'Angleterre n'a jamais couru un danger aussi grand qu'au moment de la retraite de Dunkerque. Si les Allemands eussent été prêts à l'époque, s'ils avaient traversé la Manche en même temps qu'eux à la faveur de leur confusion, d'aucuns affirment qu'ils auraient pu ainsi envahir l'Angleterre.

Mais les Allemands se sont tus à ce propos. Et les Anglais ont jugé bon de laisser à l'histoire le soin d'examiner si l'occupation de leur île aurait été possible à ce moment. (...)

Préparatifs minutieux

Les défenses de côte ont été complétées de façon à pouvoir déjouer toute tentative de débarquement sur le littoral de la Manche ou sur celui qui fait face à la Norvège. Des fortifications ont été érigées tout le long du littoral, des batteries ont été installées et des milices locales ont été affectées au service des pièces.

En outre, des forces de réserve locales ont été constituées dans tous les secteurs, prêtes à agir rapidement dans toutes les directions. Ces réserves se composent à la fois de troupes transportées par auto, de fantassins et de formations blindées.

Enfin, les ouvrages de défense des côtés sont complétés par des escadrilles de reconnaissance et de combat. Depuis que l'on s'est rendu compte que les barrages de ballons ne constituent pas une protection suffisante, on s'est efforcé de constituer une défense aérienne basée sur les avions de chasse et de combat, les fusils et les canons de la D.C.A.

On a tiré profit également au maximum des enseignements de la guerre en Crète et c'est ainsi que la défense de la Grande-Bretagne a été portée, tout naturellement, à son degré le plus élevé.

Pour que le Reich passe à l'action

Malgré tout cela, ainsi que l'a déclaré récemment encore M. Churchill, l'explosion des hostilités germano-soviétiques ne signifie pas que le danger d'invasion de l'Angleterre ait disparu. Car de même que le contre-blocus allemand (c'est-à-dire la bataille de l'Atlantique) qui a commencé en Mars, a assumé une violence accrue depuis Avril et continue à l'heure actuelle, l'activité aérienne tendant à faire crouler les centres de l'industrie de guerre anglaise, à  détruire les divers objectifs militaires importants tels que les aérodromes et les ports de ravitaillement se poursuit.

Suivant certaines suppositions, les forces destinées par l'Allemagne à l'invasion de l'Angleterre seraient à pied d'oeuvre, prêtes à entrer en action, en Norvège et en France septentrionale et Nord Occidentale. Mais on ne saurait affirmer que ces assurances ne sont pas exagérées et mêlées d'utopie.

La vérité est que les Allemands, tant qu'ils n'auront pas achevé avec succès la campagne de Russie, n'entreprendront pas l'invasion de l'Angleterre. Car l'armada aérienne allemande, qui est avant tout nécessaire pour réaliser l'invasion de l'Angleterre, est engagée actuellement en grand en Russie. Et elle y sera occupée jusqu'à la fin de la présente guerre.

En outre, pour que les Allemands entreprennent l'invasion de l'Angleterre, il faut qu'ils aient aussi terminé victorieusement non seulement la campagne de Russie mais aussi la bataille de l'Atlantique. Car ils savent mieux que personne que si cette bataille gigantesque qu'ils mènent depuis cinq mois s'achève par une victoire, il leur sera beaucoup plus facile d'envahir une Angleterre qui serait à court de vivres, d'armes et de matériel et partant épuisée.

En fait, tant que quelques millions de soldats, des centaines et des milliers de canons et de tanks seront disponibles et indemnes, en Angleterre, l'invasion ne serait pas chose facile. Il est évident d'autre part que l'Allemagne n'entreprendrait pas une initiative destinée à échouer.

L'Amérique, suprême soutien


Telles sont les raisons pour lesquelles cette invasion que M. Churchill attend d'un moment à l'autre ne se produit toujours pas. Néanmoins, l'Angleterre qui ne parvient même pas à remplacer le tiers des bateaux qui sont coulés quotidiennement dans l'Atlantique, se rend parfaitement compte de la gravité et du sérieux de la situation. Elle compte, en même temps que sur son propre effort, sur l'aide de l'Amérique. Car il y a en Amérique une majorité dans les assemblées délibérantes qui est convaincue de la nécessité d'aider jusqu'au bout l'Angleterre et il y a à sa tête une personnalité très forte telle que M. Roosevelt. C'est pour cette raison que, surtout depuis la défaite de la France, l'Amérique a développé au maximum la production du matériel de tout genre, des canons, des bateaux de commerce et de guerre et tout en accroissant ses envois à l'Angleterre elle s'efforce de créer, pour elle-même, une grande armée de terre et de l'air et une seconde flotte.

On se rend compte que, sans l'appui matériel et moral des Etats-Unis, qui est très considérable, il y a bien longtemps peut-être que l'Angleterre aurait courbé la tête. C'est parce qu'ils redoutent cette éventualité que les Etats-Unis la soutiennent, de toutes leurs forces. Comme s'il ne suffisait pas de céder gratis et avec un crédit illimité à l'Angleterre tout le matériel dont elle a besoin, ils s'efforcent de porter par leurs propres moyens ce matériel jusqu'aux abords de son île. C'est dans ce but que les Etats-Unis d'Amérique ont occupé le Groenland et l'Islande, y ont constitué des bases et, de cette façon, accroissent de façon constante leurs secours à la Grande-Bretagne.

H. EMIR ERKILET"


Jean Helleu (ambassadeur de Vichy à Ankara), dépêche n° 62 à l'amiral Darlan, 3 décembre 1941, source : André Kaspi (dir.), Documents diplomatiques français, série : "1939-1944", volume 5 : "Vichy (1er janvier-31 décembre 1941)", Bruxelles, Peter Lang, 2015, p. 1014-1015 :

"(...) malgré l'importance des victoires remportées par la Wehrmacht au cours des mois de septembre et d'octobre, la presse ne se montra pas à nouveau unanimement certaine de la victoire allemande en Russie, comme elle l'avait été au début du mois de juillet. L'ambassade d'Allemagne manifesta d'ailleurs à ce moment ouvertement un certain mécontentement de ce que les journaux ne faisaient pas suffisamment ressortir les succès germaniques et c'est une des raisons qui l'incitèrent à inviter des critiques militaires turcs à visiter le front de Russie (mon télégramme nos 1686-1687)3. Cette invitation n'amena toutefois pas le résultat escompté par le commandement allemand. Mon télégramme nos 1968-19724 a indiqué au Département que tant le général Ali Fouad Pacha [Ali Fuat Erden] que le général Erkilet n'avaient pas rapporté du front de Russie la bonne impression que le commandement allemand aurait voulu faire naître chez eux. Malgré tous les compliments que le général Erkilet a décernés à la Wehrmacht dans les articles où il narre son voyage au front, il n'a néanmoins pas caché, dans un article du 20 novembre, qu'à son avis la guerre germano-russe durerait « au moins jusqu'à l'automne 1942 ».

Quant à Ulus, qui reflète toujours la pensée du gouvernement, il se montrait à nouveau persuadé de la durée de la résistance russe et il écrivait le 20 octobre : « Les Allemands devront continuer la guerre au printemps et même pendant l'été car ils n'ont pas pu réaliser leur véritable objectif qui est l'anéantissement des armées soviétiques... Bref, le plan allemand qui visait à liquider les opérations en Russie a échoué. Et quel que soit le sort de Moscou, une campagne d'hiver dans les plaines glacées de ce pays est un fait accompli ». Ce journal reprit ensuite plusieurs fois ce thème, faisant ressortir le bénéfice que l'Angleterre retirait de la résistance russe. Il montra également que la reconnaissance de l'Angleterre devait aussi s'adresser à la Yougoslavie et surtout à la Grèce qui, en entrant en guerre, avaient retardé l'attaque allemande contre la Russie. « Si l'Allemagne avait pu commencer plus tôt sa campagne, écrivait le rédacteur en chef d'Ulus, M. Falih Rifki Atay le 15 novembre, elle aurait pu se trouver à l'automne au Caucase et peut-être même à ce moment descendre en Mésopotamie ». Et M. Atay concluait ainsi : « Une des plus grandes difficultés pour l'Allemagne sera, après une expédition si difficile, aussi longue et coûteuse en hommes, de s'opposer aux forces conjuguées de l'Amérique et de la Grande-Bretagne ».

C'est une opinion analogue que l'on entend exprimer au ministère des Affaires étrangères où, depuis quelques semaines on paraît certain d'une longue résistance russe (mon télégramme nos 1906-1907). Aussi les Turcs montrent plus qu'au cours des derniers mois la sympathie qu'ils gardent au fond du coeur pour la cause de l'Angleterre. Un certain nombre de petits faits a récemment fait ressortir cet état d'esprit : c'est le remplacement de deux ministres, dont l'un était réputé pour sa germanophilie, par des hommes de réputation plutôt anglophile ; c'est le remplacement, pour quelques semaines en principe, il est vrai, du Président du Conseil, parti en congé, par l'anglophile M. Saradjoglou ; c'est une série de manifestations anglophiles, expositions de livres, conférences, matchs de football, auxquels assistent chaque fois les principales personnalités politiques du pays. C'est enfin la sympathie non voilée avec laquelle sont suivies ici les opérations britanniques en Afrique. (...)

3 T. nos 1686 à 1687 d'Ankara en date du 5 octobre 1941, par lequel l'ambassadeur informe de l'invitation faite par le gouvernement allemand à deux généraux turcs « rédacteurs militaires de grands quotidiens d'Istanbul » de visiter le front oriental. Le gouvernement turc n'a autorisé que le général en retraite Emir Erkilet, collaborateur du germanophile Cumhurriyet, à profiter de l'invitation et a désigné un général d'active, Fouad Pacha, directeur de l'Ecole de guerre, pour cette visite du front germano-russe. Selon J. Helleu, il y a dans cette désignation un double souci : 1) chercher à profiter pour l'instruction des cadres des dernières expériences de la guerre ; 2) obtenir sur la situation militaire du front des informations recueillies par un officier ayant la confiance de l'Etat-Major. » (Guerre 1939-1945, Vichy, E Levant, Turquie, 127, document non reproduit).

4 T. nos 1968 à 1972 d'Ankara en date du 20 novembre 1941, et revenant sur la visite des deux généraux turcs sur le front germano-russe (voir note précédente). A la fois admiratif de l'armée allemande et impressionné par la résistance soviétique, le général Erkilet aurait déclaré dans une conversation privée avec un de ses compatriotes : « J'ai recueilli de mon voyage [...] une impression analogue à celle qu'avait retirée Mustapha Kémal en mars 1918, au cours de sa visite sur le front allemand où lui aussi avait été invité par le haut commandement allemand. Ce que j'ai vu ne m'a pas donné le sentiment qu'on avait voulu faire naître en moi. » L'ambassadeur estime cependant que les « prévisions du général Erkilet ne sont pas infaillibles », lui qui en juin dernier, « limitait à quelques semaines la résistance russe », et qui n'a pas visité le front côté russe. Mais Ali Fouad aurait aussi « recueilli de son voyage une impression plutôt favorable aux Russes », du fait des pertes allemandes qu'il évalue à 2 millions d'hommes et de la longueur des communications entre le front et l'arrière. (Guerre 1939-1945, Vichy, Z Europe, URSS, 837, document non publié)."


"Les milieux allemands du sud-est européen sont réservés", France (Journal quotidien paraissant à Londres avec le patronage de l'Association des Français de Grande-Bretagne), n° 592, 23 juillet 1942, p. 1 :


"Notre confrère Géraud Jouve télégraphie d'Istamboul à l'Agence Française Indépendante : (...)

“ Au sujet de la Russie, les commentateurs turcs germanophiles tels que le général Erkilet, deviennent également plus prudents et évitent d'anéantir prématurément les armes russes. ” "


"Après les entretiens anglo-turcs : La Turquie est inquiète des projets anglo-américains", L'Œuvre, 4 février 1943, p. 2 :


"Les visées russes

La Turquie, dont la position de neutralité été nettement réaffirmée récemment par ses hommes d'Etat responsables, a, en effet, tout lieu d'être inquiète des projets que Londres et Washington échafaudent dans les Balkans, projets qui tendent notamment à ouvrir la porte du Sud-Est européen.

Pour s'en rendre compte, il suffit de lire l'article que Constantin Brown, collaborateur diplomatique de la Washington Tribune, vient de consacrer à ce problème.

Brown, qui, non seulement est un spécialiste dans ce domaine, mais qui est, de plus, particulièrement bien introduit dans les milieux diplomatiques anglais, et cela lui donne un certain poids, n'a-t-il pas expliqué au public américain qu'il faut comprendre les vues des Soviets sur une certaine partie de l'Europe, depuis la Pologne jusqu'à la Bessarabie, en passant par la Moravie et la Dobroudja ?

On ne peut s'empêcher, à Berlin, de rapprocher ce plan de la prétention élevée jadis par M. Molotov lors de ses entretiens avec M. Ribbentrop. On sait en effet que M. Molotov n'envisageait rien moins que les mains libres dans les Détroits.

L'armée turque est prête

Istamboul, 3 février. — Dans un article intitulé « Force de l'unité nationale », le général Erkilet, dans le journal Oumhuriyet [Cumhuriyet], parlant de la situation politique de la Turquie, souligne que, plus que jamais, l'armée turque est prête à défendre l'indépendance du pays.

Il rappelle à ce propos les paroles prononcées par le chef de l'Etat par devant l'assemblée nationale en automne dernier, selon lesquelles la Turquie était menacée. Bien que le gouvernement turc suive une politique exclusivement neutre, elle doit se tenir sur ses gardes et à l'heure actuelle, plus que jamais, il est nécessaire que l'armée turque soit prête à faire face à toute éventualité."


"L'opinion turque est nettement favorable aux Nations Unies", Le Petit Marocain, 21 février 1943, p. 2 :


"Ankara. 20 février. — Plusieurs personnalités turques appartenant aux milieux parlementaires ou militaires ont, en de nombreuses occasions, manifesté leur hostilité à une collaboration avec les pays de l'Axe. Le 9 février, le député Yalcin écrivait dans le journal « Yeni Sabel » [Yeni Sabah] : « Nous tenons à affirmer au ministre des affaires étrangères japonais que la Turquie peut se passer des conseils ou des avertissements qui lui viennent des nations voisines ou plus lointaines. Le Japon voudrait, sans aucun doute, rallier la Turquie à la bannière de l'Axe, mais, me souciant avant tout de l'indépendance de mon pays, je n'hésiterais pas, pour ma part, si un jour nous avions à choisir, à me ranger aux côtés des démocraties, connaissant trop bien le sort qui serait réservé à la Turquie dans le cas d'une victoire de l'Axe ».

Quelques jours plus tard, le même député déclarait :

« Quand les armées nazies étaient victorieuses sur tous les fronts, l'Allemagne ignorait les autres nations. Aujourd'hui, prenant pour prétexte le soi-disant « péril rouge », elle réclame à grands cris l'aide des autres nations. Que l'Allemagne se rende bien compte que pas un seul pays en Europe ne se rangera à ses côtés, car le monde tout entier n'a aucune illusion quant aux conditions qui lui seraient imposées si l'Allemagne était victorieuse ».

Le 12 février, le « Tan » commentait en ces termes l'évacuation de Guadalcanar par les troupes nippones :

« Malgré toutes les excuses que donne le Japon, la prise de cette importante position par les Américains diminue considérablement l'efficacité du système défensif des îles japonaises ».

Trois jours plus tard, après le voyage de M. Churchill à Casablanca, puis à Adana, plusieurs députés reconnaissaient que M. Churchill, par son esprit compréhensif et par sa franchise, s'était gagné la population turque tout entière.

D'autre part, le général turc Erkilet, qui avait prédit la prise d'El Alamein par les Britanniques, puis la chute de Tripoli, n'hésitait pas à écrire dans un journal pro-nazi d'Istambul qu'El Alamein, Stalingrad et Guadalcanar devaient être considérés comme les points extrêmes de l'offensive victorieuse de l'Axe."


"L'effondrement de l'Italie est très probable écrit le général turc Erkilet", L'Echo d'Alger, 22 juillet 1943 :


"Istamboul. — Le général Erkilet écrit dans un journal turc : « Même si l'Italie ne conclut pas une paix séparée l'extension de la lutte de Sicile en Italie continentale rendrait très probable son effondrement."


"Les conditions auxquelles la Turquie entrerait en guerre", La Liberté (quotidien suisse édité à Fribourg), 24 août 1943, p. 2 :


"Ankara, 23 août.

Du correspondant spécial de l'agence Reuter :

Les raids alliés en Grèce et dans les îles grecques sont suivis avec un grand intérêt à Ankara. Si les Alliés décident de reconquérir la Grèce, la question de savoir si la Turquie doit oui ou non entrer en guerre va probablement surgir à nouveau.

Si la Turquie entrait en guerre maintenant, elle se mettrait dans une position très difficile. Les forces allemandes, italiennes et bulgares occupant la Grèce et les îles proches de la Turquie, toute tentative alliée pour envoyer des convois vers Istamboul pour protéger les forces turques en Thrace serait un suicide.

Il serait également très difficile d'amener des renforts et du ravitaillement à travers l'Anatolie par l'unique voie ferrée existante.

Le résultat de ces tentatives serait une occupation allemande de la Thrace et d'Istamboul.

En conquérant le Dodécanèse, la Crète, Rhodes et les autres îles, les Alliés s'ouvriraient le chemin des Balkans, pourvu que la Turquie entrât en guerre.

Pour que la Turquie entrât en guerre, il faudrait qu'elle fût protégée contre le danger d'une invasion allemande par l'arrivée rapide des forces alliées à Istamboul.

Une des raisons qui ont empêché la Turquie d'entrer en guerre aux côtés des Alliés en 1940 était la clause du traité anglo-turc selon laquelle la Turquie déclarait ne pouvoir participer à une guerre contre la Russie. Le fait que cette dernière lutte maintenant aux côtés de l'Angleterre et de l'Amérique rend cette clause caduque. La Turquie aurait intérêt à pouvoir participer à un règlement balkanique après la guerre. Il est important pour elle d'être en bons termes avec ses voisins balkaniques, la Roumanie et la Bulgarie, qui semblent regarder vers elle pour les aider à obtenir des Alliés un traitement favorable.

Toutefois, il y a, en Turquie, un parti très fort pour la paix.

Selon le général Erkilet, correspondant militaire du Cumhuriyet, il est improbable que les Alliés attaquent la Grèce, en raison des puissantes mesures de défense prises par les Allemands.

D'autre part, le général Erkilet estime qu'il ne vaudrait pas la peine de débarquer dans le Midi de la France sans envahir en même temps le nord. Un débarquement en Norvège ne pourrait être qu'une diversion. La véritable invasion ne peut se faire que par l'Italie, les Balkans ou le nord de la France. Une fois Brindisi et Tarente en leurs mains, les Alliés seront à même de tendre la main aux patriotes de Grèce, de Yougoslavie et d'Albanie."


"Après la chute de Samos : Un commentaire turc met en relief la négligence britannique", Le Petit Parisien, 24 novembre 1943, p. 3 :

"Stamboul, 23 novembre. — Le général Erkilet parle, dans le Cumhuriyet, de l'importance stratégique des îles se trouvant devant la côte turque.

Le général est d'avis que les Anglais ont été dernièrement coupables de grandes négligences. Ils pouvaient facilement prendre Rhodes et mettre de fortes garnisons dans Leros et Samos, d'où ils auraient pu menacer la Crète et les Balkans."

 

Sur le général Erkilet : Ali Fuat Erden et Hüseyin Hüsnü Erkilet : d'une guerre mondiale à l'autre 

Sur Fethi Okyar (dont il était l'ami) et le Parti républicain libéral (dont il était proche à Izmir) : Le sens de l'apparition du Parti républicain libéral (1930)

Les idées défendues par le Parti républicain libéral (1930)

Voir également : La Turquie kémaliste et l'Allemagne nationale-socialiste

Joseph Staline et le mont Ağrı/Ararat

L'élimination de Lev Karakhan (Karakhanian) par Staline et le refroidissement des relations turco-soviétiques

Agitation irrédentiste en Arménie stalinienne au moment du pacte germano-soviétique

Pacte de non-agression germano-soviétique : l'instrumentalisation du nationalisme arménien par Moscou 
 

La Turquie kémaliste face à l'expansion de l'Axe dans les Balkans   

La neutralité turque pendant la Seconde Guerre mondiale

Opération Barbarossa : la violente persécution de la diaspora turco-mongole par les nazis allemands

Opération Barbarossa : l'extermination partielle des prisonniers de guerre turco-mongols par les nazis

Les Azerbaïdjanais pendant la Seconde Guerre mondiale

Le maréchal Fevzi Çakmak et les Arméniens

Berlin, 1942 : rencontre entre Nuri Killigil (frère d'Enver Paşa) et Alexandre Khatissian (dachnak)

Le turcologue Gerhard von Mende et les Arméniens

Les idées défendues par le Parti républicain libéral (1930)


"En Turquie : Fethy bey publie le programme officiel du parti libéral", Le Quotidien, 14 août 1930, p. 1 :

"Stamboul, 13 août. — Fethy bey [futur Fethi Okyar, ancien officier ottoman, secrétaire général du Comité Union et Progrès en 1913] a remis au gouvernement de Stamboul le programme officiel du parti libéral et a demandé son enregistrement, conformément à la loi sur les associations.

Dans de nouvelles déclarations à la presse, Fethy bey préconise ouvertement des relations étroites avec la Société des nations, une réforme complète de l'appareil judiciaire ainsi que des garanties et des facilités pour provoquer l'apport des capitaux étrangers.


Nury bey, député de Kutahia et ami personnel de Moustapha Kemal pacha, serait nommé secrétaire général du nouveau parti de Fethy bey.

Kemal pacha abandonnerait la présidence de son parti


Ankara, 13 août. — On annonce que Kemal pacha aurait donné sa démission de président du parti populaire turc.

Cette décision serait motivée par le fait que le président désire adopter une attitude de parfaite neutralité dans la lutte politique qui doit s'engager
entre le premier ministre, Ismet pacha, et Fethy bey, qui vient de donner sa démission d'ambassadeur à Paris pour prendre la direction du parti républicain libéral nouvellement créé."


"Turquie", Le Temps, 15 août 1930, p. 2 :

"Le programme de Fethi hey

On télégraphie d'Ankara :

Fethi bey a publié le programme de son parti qui s'intitule « parti libre républicain ». Ce programme est basé sur le principe républicain et laïque, comme son concurrent, le parti du peuple. En ce qui concerne la politique extérieure, le parti libre républicain est partisan de relations amicales entre la Turquie et ses voisins et tous les pays, et d'une collaboration étroite avec la Société des nations.

Enfin, le nouveau parti est favorable au droit d'élection et d'éligibilité des femmes ainsi qu'au scrutin unique pour les élections législatives. Fethi bey a remis au gouverneur de Stamboul le programme officiel du parti libéral dont il a demandé l'enregistrement conformément à la loi sur les associations.

Dans de nouvelles déclarations à la presse, Fethi bey préconise ouvertement des relations étroites avec la Société des nations, une réforme complète de l'appareil judiciaire, ainsi que des garanties et des facilités pour provoquer l'apport des capitaux étrangers.


La parti libéral

On télégraphie d'autre part de Stamboul que le secrétaire général du parti du peuple a communiqué divers renseignements au sujet de la formation du parti libéral. Il a déclaré que ce nouveau groupement n'amènerait aucun changement dans le parti du peuple, dont Ismet pacha continuera d'être le président effectif.

Mme Makboule Hanoum [Makbule Atadan], soeur du président de la République, a adhéré au nouveau parti. Le ghazi lui-même manifeste une grande sympathie à l'égard du parti libéral, auquel se sont ralliés un grand nombre de ses amis. Aucune prévision n'est possible en ce qui concerne le développement de la situation, étant donné la résolution d'Ismet pacha de maintenir ses positions. En présence de cette situation, l'attitude définitive du ghazi à l'égard des deux partis n'est pas encore connue."


"Bulletin du jour : La tension entre la Turquie et la Perse", Le Temps, 17 août 1930, p. 1 :

"On est assez frappé du fait que la tension dans les relations turco-persanes se produise au moment où la Turquie connaît une crise intérieure assez sérieuse et où la constitution d'un grand parti républicain libéral, sous la direction de Fethi bey et avec l'assentiment de Moustapha Kemal, paraît annoncer une évolution décisive de la politique générale, intérieure et extérieure, de ce pays. A tort ou à raison, on prévoit la retraite prochaine du cabinet présidé par Ismet pacha et l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement libéral dont Fethi bey serait l'animateur et qui, d'après le programme connu du nouveau parti, favoriserait une étroite coopération avec la Société des nations et une orientation très nette vers la collaboration politique et économique avec les puissances européennes. Ce serait là un événement important, et l'entrée de la Turquie dans la Société des nations serait la conclusion logique de tout remaniement dans ce sens du personnel dirigeant turc. Pourtant, nul ne sait, à cette heure, comment la situation évoluera à Ankara et il est bien évident que la tension des relations turco-persanes et les complications qui peuvent s'ensuivre constituent une puissante diversion aux préoccupations d'ordre intérieur."


"L'évolution politique de la Turquie et la rentrée de Fethi Bey", Le Figaro, 17 août 1930, p. 3 :

"Stamboul, 16 août. — La création du nouveau parti républicain libéral est ainsi jugée par le journal Milliet, organe officieux du parti du peuple :

« Les déclarations successives, les commentaires de la presse et de la population augmentent chaque jour les moyens qui permettront à Ismet pacha de défendre efficacement son programme et ses actes quand viendra l'heure de s'expliquer. Le gouvernement d'Ismet pacha et la presse du parti du peuple feront voir clairement le fossé séparant le rêve de la réalité. »

Le Milliet souhaite que Fethi Bey ne laisse pas se glisser dans ses méthodes les mauvais principes engendrés, selon le journal, par les vieilles méthodes occidentales. Cette opinion prouve que le ministère Ismet pacha se prépare à la défense et montre que la presse apprécie diversement le programme de Fethi Bey.

Fethi Bey n'aura pas une tâche facile, car Ismet pacha s'est montré homme politique avisé en s'entourant de partisans dévoués ; il n'est pas prêt ni désireux d'abandonner le pouvoir. La situation paraît plutôt anormale en ce moment en Turquie, où le pays n'est pas habitué aux rivalités de partis politiques, et étant donné par ailleurs les frais considérables que semble devoir occasionner encore la campagne commencée depuis six semaines contre les Kurdes."


André Petit, "A l'extérieur : La nouvelle orientation politique de la Turquie", L'Ere nouvelle, 24 août 1930 :


"L'ambassadeur de Turquie à Paris, Fethi bey, va prochainement présenter ses lettres de rappel au Président de la République Française : il abandonne la « carrière » pour se consacrer à la politique.

Il vient, en effet, de créer en Turquie un groupe républicain libéral, et ce nouveau parti politique semble avoir l'oreille du ghazi, Mustapha Kemal pacha : d'après les dépêches, le parti de Fethi bey recueillerait de nombreuses adhésions, et il semble qu'aux futures élections il viendra en majorité au Parlement et sera, en conséquence, appelé à prendre le pouvoir.

On ne connaît pas encore dans ses détails le programme de Fethi bey ; mais sa rentrée dans la vie politique turque marque un coup de barre donné à l'orientation économique et financière de la Turquie. Nos lecteurs savent que la Turquie s'est tenue à l'écart de la vie européenne, qu'elle ne fait pas partie de la Société des Nations et qu'à la suite du bouleversement, ou, pourrait-on mieux dire, de la révolution sociale turque, elle s'est recroquevillée sur elle-même, en dehors de ce que l'on appelait avant la guerre le concert européen.

Le programme de Fethi bey marque le désir d'une collaboration avec la Société des Nations et les Etats voisins des Balkans : il réclame le suffrage universel direct avec le vote des femmes et accorde des droits civiques et politiques égaux à toutes les minorités raciales et religieuses : grecques, arméniennes, juives.

Mais ce qui caractérise, notamment, le programme de Fethi bey c'est l'annonce des réformes économiques et financières, qui seraient de nature à encourager l'investissement des capitaux étrangers en Turquie : il envisage, en outre, la stabilisation de la devise et une réforme de certaines taxes excessives sur les chemins de fer les postes.

Cette tendance très marquée à rechercher la collaboration de l'étranger pour le financement de grands travaux et d'entreprises industrielles, cet appel aux capitaux au dehors demande que soit inaugurée une politique différente de celle qui a été faite jusqu'à ce jour.

Il sera tout d'abord nécessaire d'observer certains principes financiers, en matière de finances publiques ; il faudra tenir un certain rapport entre le taux des impôts et la situation économiques : il sera indispensable de comprimer les dépenses pour la défense nationale, la construction de chemins de fer stratégiques, d'augmenter par contre les dépenses productives consacrées à l'agriculture et au développement économique. On devra, en outre, observer un strict équilibre du budget et contracter des habitudes d'économie peu en usage dans les pays orientaux.

Si la Turquie veut gagner la confiance de l'étranger, il faudra qu'elle fasse honneur aux engagements qu'elle a pris, concernant le paiement de coupons de la dette ottomane : sa situation financière est certes difficile ; elle est imputable à la dépression commerciale mondiale, à une série de récoltes déficitaires, et au déficit d'exportation des produits turcs : le manque d'encouragement et la confiance accordée par le gouvernement Mustapha Kemal aux capitaux étrangers, la pratique de « l'isolement » ont aggravé encore la situation économique financière de la Turquie.

Déjà le gouvernement actuel d'Ismet pacha semble reconnaître les erreurs commises.
Il projette la création d'une banque d'Etat ; il étudie la stabilisation de la monnaie, et il va publier un plan économique, échelonné sur cinq années.

Toutefois, il faut remarquer que la récente déclaration du ministre des Affaires étrangères turc risque de contrebattre ces bonnes dispositions : le ministre n'a-t-il pas, d'une façon voilée, demandé un moratorium pour le paiement des coupons de la dette ottomane, et n'a-t-il pas affirmé que le service des coupons de la dette étrangère paralysait la vie nationale turque, et qu'il était nécessaire que les engagements financiers de la Turquie soient ramenés au niveau de sa capacité de paiement ?

Cette déclaration reproduite par le Times ne semble pas devoir ramener la confiance de l'étranger que le parti de Fethi bey veut conquérir : l'orientation politique nouvelle marquée par Fethi bey devra être appuyée par une réorganisation des méthodes administratives, par l'application rigide des principes économiques et financiers généralement admis par les autres nations. A cette condition, la confiance sera rétablie et la Turquie pourra retrouver les concours nécessaires pour assurer son plein épanouissement économique.

Deux partis vont donc exister désormais en Turquie : mais ce qui distingue cette lutte politique c'est que le parti d'Ismet pacha, actuellement au pouvoir, et celui de Fethi bey s'inspirent des mêmes principes : les méthodes seules diffèrent. Si Fethi bey prend le pouvoir, son premier soin sera, si nous en croyons les opinions autorisées, de respecter les engagements pris par la Turquie, de faciliter l'afflux des capitaux étrangers, tout en restant fermement résolu à ne pas souffrir de donner à une puissance étrangère une prédominance politique : on peut dire que la nouvelle expérience de Mustapha Kemal sera suivie par l'étranger avec beaucoup d'intérêt et une évidente bienveillance."


"Un nouveau discours de Fethi Bey", La Liberté, 10 septembre 1930, p. 5 :


"LONDRES, 9 septembre. — Le correspondant du Times à Stamboul télégraphie :

Fethi Bey, chef du nouveau parti républicain libéral, a de nouveau parlé au Stade de Smyrne devant une foule estimée à près de 50.000 personnes, bien que le journal officiel Milliet prétende que 5.000 personnes seulement fussent présentes.

Il n'y a pas eu d'incidents et Fethi Bey a été écouté attentivement.


Il déclara que le parti créé avec le consentement de Mustapha Kemal approuvait la construction d'un chemin de fer en Anatolie, mais qu'il n'était pas d'accord avec le système adopté par Ismet Pacha et que les contrats passés avec les groupes belge, suédois et allemand constituaient une charge trop lourde pour le contribuable turc.

Au sujet de l'entrée de capitaux étrangers en Turquie, Fethi Bey a déclaré qu'il était d'abord nécessaire de stabiliser la devise turque et que le taux d'intérêt en usage dans les villes et les villages, variant de 15 à 40 %, était trop élevé et ne pouvait qu'amener la ruine économique.


Quant aux monopoles d'Etat, il s'affirma partisan de la suppression des monopoles de l'essence, du sucre et du port de Stamboul. Il recommanda un accord sur l'exploitation du monopole des tabacs."


Jean-Paul Burdy, "Modernité autoritaire et extension des droits civiques : Le suffrage universel octroyé aux femmes dans la Turquie kemaliste des années 30", in Gérard Chianéa et Jean-Luc Chabot (dir.), Les droits de l'homme et le suffrage universel, 1848-1948-1998 : Actes du colloque de Grenoble, avril 1998, Paris, L'Harmattan, 2000, p. 161 :


"L'annonce de la participation du tout récent Parti républicain libéral aux élections locales contribue à aggraver le trouble : car Nezihe Muhittin [femme de lettres], la journaliste Suat Dervis, mais aussi Makbule Hanïm (la propre sœur de Mustafa Kemal) sont membres du nouveau parti, dont l'article 11 des statuts insiste sur l'importance de la place des femmes (et des ouvriers et des non-musulmans) dans le parti et dans la société : « Le Parti travaille pour l'accès des femmes aux activités politiques ». Nezihe Muhittin organise une association (L'Existence féminine) proche du PRL, et qui se pose en rivale de l'UFT [Union des femmes turques]. Une forme de concurrence s'établit alors entre candidates à l'adhésion au PRP [Parti républicain du peuple], et candidates à l'adhésion au PRL. Les premières, critiquées comme « esclaves du PRP », dénonçant en retour l'élitisme des secondes."


Laurent-Olivier Mallet, La Turquie, les Turcs et les Juifs. Histoire, représentations, discours et stratégies, Istanbul, Isis, 2008, p. 245 :


"Mustapha Kemal, souhaitant laisser s'exprimer le libre jeu démocratique, autorisa la création d'un parti d'opposition, le Serbest Cumhuriyet Fırkası (Parti Républicain Libéral). Ce dernier, dirigé par un proche du Président, Fethi (Okyar) bey, ancien Premier Ministre et ambassadeur de Turquie à Paris, plaça plusieurs non-musulmans sur ses listes. On trouve ainsi, en lice pour la municipalité de Beyoğlu à Istanbul, deux avocats membres de la communauté, Marko et Avram Nahum. D'autres candidats juifs se présentèrent sur des listes du SCF en Thrace."

Turhan Feyzioglu, "Les partis politiques en Turquie : Du parti unique a la démocratie", Revue française de science politique, 4e année, n° 1, 1954, p. 138 :

"On a même entrepris deux essais de multipartisme, assez significatifs, durant cette période. Un parti d'opposition, le Parti républicain progressiste, fut fondé en 1924 par des députés démissionnant du Parti républicain populaire. Malgré son nom, le nouveau parti était conservateur (contradiction assez fréquente dans le domaine des partis politiques) et fut soutenu par les milieux cléricaux et réactionnaires. Un soulèvement armé dans les provinces orientales, auquel s'étaient mêlés certains dirigeants locaux du parti, amena sa fin.

Entre 1924 et 1928 les principales réformes de modernisation et de laïcisation sont réalisées : on abolit le Khalifat, on interdit les confréries religieuses et l'emploi de certains titres religieux, on ferme les « tékkés », on rejette le fez ; le Code civil suisse est adopté avec tous les résultats révolutionnaires qu'il comporte (interdiction de la polygamie, égalité de la femme et de l'homme) ; la modernisation et la laïcisation des tribunaux, du code pénal et des codes de procédure — entreprises sous la Seconde Monarchie Constitutionnelle par le Parti d'Union et de Progrès — sont complétées, ainsi que la laïcisation et la neutralisation de l'enseignement à tous les degrés : un alphabet phonétique basé sur les caractères latins et très facile à apprendre remplace l'alphabet arabe ; le calendrier est réformé ; l'article de la Constitution relatif à la religion de l'Etat est aboli.

Une fois ces principales réformes, dont certaines mûrissaient déjà depuis longtemps, réalisées, Mustafa Kemal encourage de nouveau la formation d'un parti d'opposition. Mais le Parti libéral républicain, fondé par Fethi Okyar en 1930 attire à son tour les éléments réactionnaires. D'autre part, son développement rapide et peut-être inattendu suscite des inquiétudes vives dans les milieux gouvernementaux. Au bout d'un certain temps, Mustafa Kemal renonce à son attitude neutre et prend position en faveur du Parti républicain populaire. Le leader du nouveau parti, qui est lui-même un réformiste convaincu, décide de dissoudre son parti. Ces deux essais prouvent du moins, pour employer encore une fois une expression de M. Duverger, que le Parti républicain populaire « avait mauvaise conscience » et qu'il reconnaissait la valeur du pluralisme, à la différence des partis communistes et fascistes." 


Sur Fethi Okyar : Ali Fethi Bey en Tripolitaine (1911-1912)

Sur le Parti républicain libéral (SCF) : Le sens de l'apparition du Parti républicain libéral (1930)

Les liens entre les Foyers turcs et le Parti républicain libéral

Ali Fuat Erden et Hüseyin Hüsnü Erkilet : d'une guerre mondiale à l'autre

Voir également : Le programme des Jeunes-Turcs sous la République kémaliste

Hüseyin Cahit Yalçın, une victime oubliée de la répression politique en Turquie 
 
Hüseyin Cahit Yalçın et les Grecs

L'intégration et l'émancipation des femmes sous les Jeunes-Turcs 

Féminisme et nationalisme turc

L'opposition du Parti républicain progressiste (1924-1925)

L'autoritarisme kémaliste
 
L'étatisme kémaliste

Progressisme kémaliste, arriération coloniale 

Le développement accéléré des infrastructures sous Kemal Atatürk

L'oppression "chrétienne" des Juifs en terre d'Islam : le rôle libérateur des résistants kémalistes et gaullistes

Un choix du nationalisme kémaliste : conserver les populations arméniennes encore présentes sur le territoire turc

Le kémalisme : un nationalisme ouvert et pacifique

Thrace, 1934 : la lutte implacable d'İsmet İnönü et Şükrü Kaya contre l'agitation pogromiste locale

Berç Keresteciyan : un député arménien sous Atatürk et İsmet İnönü

La Turquie kémaliste et l'Allemagne nationale-socialiste

La présidence d'İsmet İnönü (1938-1950) : un souffle nouveau pour la République turque