samedi 27 juin 2020

1922 : l'ultime visite de Cemal Paşa (Djemal Pacha) en France




Auguste Gauvain, "Les Soviets et la Touranie", Journal des débats politiques et littéraires, 20 mars 1922, p. 1 :

"Puisque nous avons parlé de Djémal Pacha, nous devons exprimer notre étonnement que cet homme, qui figure en tête de la liste des turcs accusés de crimes par les Alliés, circule librement en France. Djémal Pacha, qui gouvernait la Syrie après la déclaration de guerre, a fait exécuter et torturer les Syriens protégés français ou amis de France dont il a trouvé les noms dans les archives de notre Consul général à Beyrouth. Nous serions en droit de l'incarcérer et de le mettre en jugement. Il peut rencontrer à chaque pas sur les boulevards parisiens les parents de ses victimes. Et il se trouve des Français pour l'accueillir comme une sorte de héros. Ce dévergondage politique est une offense intolérable à la morale et au bon sens."


"Affaires étrangères", Journal officiel de la République française, n° 54, 15 avril 1922, p. 1485 :


"13125. — M. Léon Barré, député, demande à M. le ministre des affaires étrangères s'il est exact que l'ancien gouverneur turc de la Syrie, Djémal pacha, tortionnaire des Syriens chrétiens et musulmans, assassin des amis et protégés de la France, pendus à Beyrouth, Damas et Jérusalem par suite de la négligence d'un haut fonctionnaire français et la trahison d'un de ses subalternes, circule librement en France, s'il ne figure pas avec Enver et Talaat sur la liste des criminels dont les Alliés ont exigé le châtiment, et si sa présence en France, en dehors d'une prison en attendant son jugement, ne peut être considérée comme un outrage à la mémoire de ses victimes. (Question du 22 mars 1922.)

Réponse. Djemal pacha, ancien ministre de la marine ottomane, venu en France sous un nom d'emprunt, ne se trouve plus actuellement sur le territoire français."


Chekib Arslan (émir druze), mise au point dans L'Humanité, 30 juin 1926, p. 3 :


"M. de Jouvenel prétendit que j'étais « l'homme de Djemal pacha », lorsqu'il y avait tant de preuves du contraire : il a rectifié tout de suite en disant que j'étais « le chef des volontaires de Djemal pacha ».

Or, j'ai été « chefs des volontaires libanais », pendant que Djemal pacha était commandant de la quatrième armée, dans la guerre générale, ce qui ne veut pas dire que j'étais « chef des volontaires de Djemal pacha », car on peut être, dans une guerre, sous les ordres d'un commandant, sans être son homme. J'ai été « chef des volontaires » de mon pays et j'en suis fier.

Par conséquent, lorsque l' « Agence Havas » télégraphie de Genève que j'ai cru « interrompre M. de Jouvenel qui rappelait mon passé », j'ai le droit de répondre que s'il s'agit d'avoir commandé un corps de volontaires pour combattre les puissances qui s'étaient déjà partagé secrètement notre pays, je ne m'en repens pas. Mais Djemal pacha, qui avait pendu cinquante intellectuels [nationalistes] syriens et dont la tête fut promise aux Syriens par les autorités françaises en Syrie, était reçu avec sympathie à Paris, l'an 1922, et les promesses quant à sa « tête » furent oubliées..."


"Syrie", Correspondance d'Orient, n° 291-292, 15-30 août 1922, p. 482 :

"Djemal pacha assasiné [assassiné] à Tiflis.

Londres, 25 juillet.

Le correspondant spécial du Times en Orient annonce, d'après un télégramme du consul italien à Tiflis, que Djemal pacha, l'ancien commandant des forces turques de Syrie et de Plestine [Palestine] et, aujourd'hui, le conseiller ottoman délégué auprès de l'armée afghane, a été tué a coups de revolver à Tiflis, le 21 courant, ainsi que ses deux aides de camp. Les auteurs du meurtre ont disparu.

Djemal pacha, au moment où il a été assassiné, revenait d'une visite à Paris, où il était allé faire des commandes d'armes et de munitions pour le gouvernement d'Afghanistan."


Sur Cemal Paşa : Cemal Paşa (Djemal Pacha), le "Turc turcophile"

Un entretien avec Cemal Paşa (1914) 

Les témoignages arméniens sur le "génocidaire" Cemal Paşa (Djemal Pacha)

Famines du Liban et de la Syrie : le témoignage du grand-père maternel de Walid Joumblatt

Cemal Paşa et les Juifs

L'hypothèse d'une collusion Enver-Cemal contre la Russie bolcheviste

Sur l'anti-bolchevisme de l'Entente et la rivalité franco-britannique en Orient (deux paramètres à prendre en compte et qui ont eu un impact décisif sur la conclusion du traité de paix de Lausanne) : Mehmet VI et le califat ottoman dans le jeu de l'impérialisme britannique 

Le panislamisme et le panturquisme de Nuri Paşa (frère d'Enver Paşa)

Le triangle Vahdettin-Kemal-Enver dans le contexte du conflit entre l'Entente et la Russie bolcheviste

Le général Kâzım Karabekir et les Arméniens

L'anti-bolchevisme de Kâzım Karabekir et Fevzi Çakmak

Enver Paşa (Enver Pacha) : la fin d'un héros national
  
L'opposition du Parti républicain progressiste (1924-1925)

mercredi 24 juin 2020

Hüseyin Cahit Yalçın, une victime oubliée de la répression politique en Turquie




"La crise turque", Le Temps, 13 septembre 1912, p. 2 :

"Le congrès d'Union et progrès

Le congrès du parti Union et progrès [évincé du pouvoir par un coup de force des "libéraux" anglophiles] a élu un comité central composé de 24 membres. Abdullah Sabri, Zia et Midhat, anciens députés, Talaat, ancien ministre, qui appartenaient à l'ancien comité central, Ismaïl Hakki, ancien vali de Van, et le prince Saïd Halin, sénateur, ancien ministre, forment le bureau permanent.

Le prince Saïd Halin a été élu président du bureau permanent, avec le titre de secrétaire général.

Le comité central comprend deux chrétiens, Bostani, Arabe, sénateur, et Haladjian, Arménien, ancien ministre ; en outre Djavid, Hairi, Moussa Kiaz, Amroullah et Hadj Adil, anciens ministres ; Djahid et Babanzade, du Tanine ; le chérif Djaffer, Arabe, le sénateur Hussein Kiazin, ancien vali de Salonique ; Munif, ancien vali de Monastir ; Ayoub Sabri, Albanais ; le médecin Nazim, qui appartenait à l'ancien comité, et Nessini, Crétois, ancien député.

Le congrès est clos.

Le comité central élaborera un programme et publiera des brochures pour exposer sa politique dont le but est l'union et le progrès. Le bureau permanent s'occupera exclusivement des affaires administratives du parti.

Djahid, Djavid et Talaat condamnés


Les poursuites intentées devant la cour martiale au Tanine et au Djenine (qui remplaça le Tanine suspendu) se sont terminées hier par la condamnation à un mois de prison de Djahid, directeur du Tanine, délégué des porteurs ottomans de la Dette publique.

Djavid, gérant du Djenine, ancien ministre, et Talaat, gérant du Tanine, sont condamnés à vingt jours de prison.

Le Tanine était poursuivi à raison d'une série d'articles sur la question albanaise.

Djahid avait prié la cour de ne pas condamner Djavid qui se trouvait à Salonique et ignorait les articles du Djenine, lequel vécut seulement un jour, mais de le condamner lui-même à une peine double.

Les trois condamnés ont été immédiatement incarcérés à la prison centrale de Stamboul. Ils ont reçu de nombreuses visites de leurs amis.

Le Sinine, le nouvel, organe d'Union et progrès, auquel appartiennent les condamnés, dit qu'aussitôt après leur condamnation, Djahid, Djavid et Talaat furent incarcérés dans un cachot souterrain de la prison du ministère de la guerre où se trouvaient déjà un certain nombre de prisonniers à moitié nus et couverts de vermine. Quelques instants après ils furent transférés à la prison centrale de Stamboul.

Le Sinine ajoute que pendant la délibération de la cour martiale, Nazim pacha fit appeler un des membres de la cour et que la sentence fut rendue immédiatement après le retour de cet officier.

Le commissaire du gouvernement, dans son réquisitoire, n'a pas mentionné l'article de la loi sur lequel il se basait pour réclamer une condamnation ; le président a fait de même en prononçant la condamnation contre Djavid, Djahid et Talaat."


"La crise turque", Le Temps, 20 septembre 1912, p. 2 :

"Mesures contre les chefs d'Union et progrès

Il a été interdit à Djahid, Djavid et Talaat, qui ont été condamnés récemment par la cour martiale, de recevoir des visites autres que celles des membres de leur famille ; ceux-ci ne seront admis dans la prison qu'une fois par semaine.

Djahid s'est vu, en outre, faire interdiction d'écrire. Le Tanine déclare que cet ordre émane du ministre de l'intérieur.

Il convient de rappeler que les députés Riza Tevfik et Cosmidi, qui furent également condamnés par la cour martiale, sous le ministère Saïd pacha, et comme les détenus actuels pour la publication d'articles de journaux, eurent pendant toute la durée de leur emprisonnement pleine liberté de recevoir des visites quelconques et aussi l'autorisation d'écrire.

On assure que l'interdiction d'écrire a été faite à Djahid pour l'empêcher de traiter la question d'Albanie.

En conformité d'un ordre du gouvernement, le vali et les autorités militaires de Salonique procèdent a des perquisitions chez les principaux unionistes pour y découvrir des documents concernant les prochaines élections. Sur la dénonciation d'un espion, on a fait des recherches dans la maison d'Ismaïl bey, ancien maire. On n'a rien trouvé.

Cette violation du domicile de musulmans provoque une grande surexcitation dans la population musulmane et dispose favorablement pour les unionistes l'opinion publique et surtout le corps des officiers, qui sont très indignés du changement de garnison imposé sans motif sérieux à nombre d'entre eux."


"A Constantinople : Le gouvernement turc et le comité", Le Temps, 16 novembre 1912, p. 2 :

"On télégraphie de Constantinople :

L'ordre règne partout en ville ; aucun incident n'est signalé.

Le gouvernement, à la suite de la dernière tentative faite par le comité pour revenir au pouvoir, prend des mesures sévères contre les jeunes-turcs.

Tewfik bey, second chambellan du sultan, qui était soupçonné d'avoir favorisé des démarches des jeunes-turcs auprès du sultan, a été destitué de ses fonctions.

On confirme que l'ex-ministre Djavid bey, et Djahid, directeur du Tanine, contre lesquels on avait lancé des mandats d'amener, ont réussi à s'enfuir en Europe par Constantza."


"Dans les Balkans", Le Temps, 7 février 1919, p. 1 :

"La situation en Turquie

On télégraphie de Constantinople :

La police procéda à l'arrestation des membres les plus notoires du parti Union et progrès, tels que Rahmi bey, Djahid bey Hussein, Ali bey Djambolat, Carasso, etc. Pour toute éventualité des mesures de police exceptionnelles ont été prises."


"Dans le Proche Orient", Le Temps, 27 décembre 1923, p. 2 :

"Le procès des directeurs de journaux en Turquie

On mande de Constantinople :

Après quatre jours d'audience, le procureur général a prononcé son réquisitoire contre les journaux le Tanine, l'Ikdam et le Tevhid-Efkar. Il conclut à l'acquittement des gérants responsables et à la condamnation des rédacteurs en chef. Il demande toutefois une atténuation de peine en faveur de Djahid bey du Tanine, qui a nettement défendu les idées du groupe politique dont le Tanine est l'émanation.

La sentence du tribunal est attendue dans le courant de la semaine prochaine."


"Dans le Proche-Orient", Le Temps, 10 mai 1925, p. 2 :

"Journalistes turcs condamnés

On mande d'Angora :

Le tribunal de l'indépendance, siégeant à Angora, a rendu vendredi, après avoir entendu les plaidoiries, sa sentence dans le procès intenté contre les rédacteurs du journal Tanine.

Hussein Djahid Bey, directeur du journal, a été condamné à la déportation perpétuelle, conformément à l'article 17 de la loi sur la presse ;

Mouammer et Nouri bey, rédacteurs, ont été condamnés à deux ans de prison ;

Beha bey, secrétaire de la rédaction, a été acquitté.

Hussein Djahid bey sera relégué à Tchoroun, petite localité d'Anatolie.

On mande de Londres :

Le Times proteste contre la condamnation infligée au rédacteur du Tanine.

Il devient, dit le Times, un peu difficile de combattre l'accusation portée contre la Turquie de repousser instinctivement les idées modernes et de retomber dans la barbarie."


Robert Charlet, "Les relations franco-turques : La situation en Turquie", Le Gaulois, 17 mai 1925, p. 2 :

"La condamnation de Hussein Djahid bey a produit une immense impression en Turquie et à l'étranger et elle ne contribuera certainement pas à atténuer la rivalité qui existe entre Constantinople et Angora, et à désarmer l'opposition qui existe dans de nombreux milieux turcs contre le gouvernement d'Angora. Ces tribunaux, dits de l'indépendance, sont des tribunaux de la terreur. Les journaux anglais, et tout particulièrement le Times, protestent contre la condamnation de Djahid bey, qui est le doyen et le plus important des journalistes turcs.

Ces procédés, rappellent le temps où régnait à Constantinople le Sultan Rouge. La république kémaliste, la justice, l'équité, la liberté de la presse, tout cela, ce sont de vains mots. « La Turquie kémaliste est aussi éloignée du régime démocratique et républicain qu'elle était à l'époque du sultanat. Moustapha Kemal règne avec un despotisme absolu. Tout doit s'incliner devant lui ». C'est ainsi que s'exprimait M. Paul Berthelet, qui a donné, dans l'Echo de Paris, une série d'articles sur la Turquie et sur sa capitale, Angora, la misérable bourgade anatolienne."


P. Gentizon, "Lettre de Turquie : L'Union et Progrès", Le Temps, 11 août 1926, p. 2 :

"C'est donc dans cette dernière ville [Ankara] que se déroule maintenant le grand procès de l'unionisme. Comparaissent devant le tribunal d'indépendance des hommes politiques comme Djavid bey, ancien ministre des finances, qui, à la veille de la guerre mondiale, vint conclure à Paris un emprunt de cinq cents millions de francs ; Ahmed Nessimy bey, ancien ministre des affaires étrangères ; Azmi bey, directeur de la police de Constantinople et ex-gouverneur de Beyrouth ; le docteur Nazim, de Smyrne, fondateur de l'Union et progrès ; Midhat Chukry bey, secrétaire général de l'organisation ; Kara Vassif, ancien député de Sivas ; Hussein Avni, ancien député d'Erzeroum; Selaheddine el Naï, anciens députés de Mersine, et près de cent autres inculpés. L'ancien directeur du Tanine, Hussein Djahid, déjà déporté à Tchorum, a été également traduit à Angora. L'ancien président du conseil Reouf bey, ainsi que deux autres unionistes de marque, Adnan bey, ancien député, et Rahmi bey, ex-vali de Smyrne, se trouvant à l'étranger, seront jugés par défaut. Il en sera de même de l'ancien vali d'Angora, Abdulcadir, qui, bien qu'encore en Turquie, n'a pu être arrêté par la police."


"Dans le Proche-Orient", Le Temps, 6 novembre 1926, p. 2 :

"Hussein Djahid bey à Constantinople

Notre correspondant particulier à Constantinople nous écrit :

L'ancien directeur du Tanine, ex-président de la Chambre ottomane, Hussein Djahid bey, condamné l'an dernier au bannissement à vie en Anatolie, est rentré à Constantinople après avoir été gracié par le gouvernement. Il a déclaré qu'il ne s'occuperait plus de journalisme et se consacrerait désormais à des travaux littéraires, ainsi qu'à la pédagogie."


"Vives controverses sur la liberté de la presse", Le Monde, 11 décembre 1954 :

"Ankara, 10 décembre. - L'éditorial du New-York Times d'avant-hier a fait rebondir la question de l'incarcération de Huseyin Djahit Yaltchin, doyen de la presse turque, emprisonné la veille de son quatre-vingtième anniversaire. Ledit article disait en substance : "Un pays où plus de vingt écrivains et journalistes sont emprisonnés n'est pas un pays libre." Il contenait d'autre part une allusion explicite au régime péroniste, qualificatif souvent attribué au gouvernement actuel par la presse d'opposition. Le rédacteur en chef du journal progouvernemental Zafer donne sur cinq colonnes une réplique sur un ton courtois mais ferme qui dénote une irritation peu coutumière. "La Turquie n'a pas à changer son régime par reconnaissance pour autrui, ni à pencher du côté où est la force." Il justifie cette mesure d'emprisonnement par la loi votée à l'Assemblée nationale souveraine et le verdict prononcé par la justice indépendante, sanctionné par la Cour de cassation.

Le sort fait à l'article du New-York Times est révélateur de l'émotion profonde créée dans l'opinion par l'arrestation d'un vétéran qui risque de devenir un symbole et un "martyr".

Rappelons que Huseyin Djahit fut le fondateur du journal Tanin, organe des jeunes Turcs, et qu'il fut déporté à Malte à la fin de la première guerre mondiale. Remarquable polémiste, auteur notamment d'un livre au titre révélateur, Mes querelles, ardent libéral sous l'empire, il n'a peut-être pas montré quand il était du côté du pouvoir la magnanimité que ses amis réclament pour lui aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, l'affaire a le mérite de poser dans toute son ampleur le problème de la liberté de la presse en Turquie. Si la question a pris un tour trop aigu pour qu'on puisse envisager un recul du gouvernement, on ne saurait oublier que le ministre d'Etat M. Mukerrem Sarol, abandonnant sa plainte, a permis la libération d'un autre journaliste, M. Bedit Faik, de l'opposition, et dont le Monde a annoncé récemment l'arrestation."


Simavna, " « Faux calcul revient de Bagdad » ", Démocratie nouvelle, 10e année, n° 2, février 1956, p. 100 :

"Pour préciser la situation, voici la réponse d'un porte-parole du gouvernement à une récente question de l'opposition :

1) De 1950 à ce jour 419,7 millions de dollars ont été reçus des U.S.A. ;

2) La dette d'Etat en 1955 est de 982 millions de livres turques ;

3) Les intérêts des différents emprunts à rembourser s'élèvent à 100 millions par an (créancier principal : les Etats-Unis).

Ajoutons, en passant, que la Turquie doit 356 millions de dollars à l'Union européenne des paiements.

Devant cette situation menaçante, Mendéres, pour se maintenir au pouvoir, eut recours à des méthodes de dictature devenues classiques : terreur à l'intérieur du pays ; politique d'aventure à l'extérieur.

Des journalistes pourtant réactionnaires à souhait furent jetés en prison pour un rien. Le vieux vétéran antisoviétique Hussein Djahid Yaltehin (membre du parti du peuple) fut emprisonné à Scutari pour n'avoir pas su tenir sa langue ; d'autres journalistes eurent les cheveux tondus ; les attributions de papier et les subventions d'annonces officielles furent savamment dosées pour modérer les velléités de critique des journaux « libres »."


Sur Hüseyin Cahit Yalçın : Hüseyin Cahit Yalçın et les Arméniens
 
Hüseyin Cahit Yalçın et les Grecs
 
 
Hüseyin Cahit Yalçın et Refik Saydam face à la question des Juifs turcs et étrangers en Turquie

Hüseyin Cahit Bey et la révolte de Şeyh Sait (1925)
     
Le programme des Jeunes-Turcs sous la République kémaliste
   

La présidence d'İsmet İnönü (1938-1950) : un souffle nouveau pour la République turque
 
Les activités collaborationnistes de Garéguine Njdeh en Bulgarie

Voir également : La révolution jeune-turque ou l'inextinguible lumière de l'espoir

Le vrai visage de l'"alternative libérale" au Comité Union et Progrès et au kémalisme

Reprendre Edirne : l'objectif entêtant des Jeunes-Turcs (1913)
  
L'opposition du Parti républicain progressiste (1924-1925)

L'Armée, la gardienne de la démocratie turque

lundi 22 juin 2020

L'émir druze Chekib Arslan, la Turquie et les impérialismes




Juliette Bessis, "Chekib Arslan et les mouvements nationalistes au Maghreb", Revue historique, n° 259, avril-juin 1978 :

"Homme politique au service de la Turquie, proche des « Jeunes Turcs », il se dépense sans compter pour obtenir des soutiens à « La Porte » lors des guerres balkaniques et libyques. Il accomplit en 1912 une mission en Libye séjournant, dit-il, huit mois auprès des tribus Sénoussites pour organiser la résistance à l'occupation italienne. C'est sa première rencontre avec le Maghreb. Son passage en Tunisie est signalé à cette occasion par les services de renseignements français ; il serait secondé par un Tunisien, Ali Djebara, pour organiser le soutien et le ravitaillement aux troupes turques de Tripolitaine. (...) En Libye, Chekib Arslan collabore avec un autre personnage notoire de l'histoire ottomane, Enver Pacha.

Rentré à Constantinople, il se sépare de ceux qu'il appelle les extrémistes syriens qui réclament l'indépendance totale de la Syrie et la séparation d'avec la Turquie. Opposé à toute rupture entre Turcs et Arabes, Chekib Arslan écrit à la veille de 1914 un ouvrage Aux Arabes pour appeler ces derniers à l'union au sein de l'Empire turc. Son « panturquisme » résolu est fondé sur un panislamisme constamment affirmé, il veut oeuvrer à l'union la plus large possible des Musulmans autour de l'Empire Khalifal. Les convictions panislamistes demeurent constantes chez Chekib Arslan et sont soutenues par ses écrits ; seul le contenu en changera sous la pression des événements.

Favorable à l'alliance germano-turque, il soutient l'entrée en guerre de la Turquie aux côtés des Empires centraux, contrairement semble-t-il à Ali Bach Hamba [anticolonialiste tunisien et dirigeant de l'Organisation Spéciale], d'abord partisan d'une neutralité sous forme de paix armée. Pendant la guerre, il se dépense sans compter pour recruter Syriens et Druzes au service de l'armée turque.

Considéré comme un des responsables des liaisons entre services secrets turc et allemand, il accomplit sous l'autorité de Talaat Pacha plusieurs missions en Allemagne au cours de la guerre. Ami personnel du Kaiser, il revendique hautement cette amitié à plusieurs occasions la photographie dédicacée de l'ex-empereur est toujours en bonne place dans son salon des années plus tard lorsqu'il reçoit à Genève des journalistes italiens.

C'est de Berlin où il est en mission depuis 1917 qu'il assiste à l'effondrement allemand." (p. 469-470)

"Chekib Arslan se rend avec une délégation syro-palestinienne à Ankara en 1923 pour plaider la cause du sultan déposé et en faveur d'un gouvernement arabe syro-palestinien uni à la Turquie, ou tout au moins d'un front turco-arabe dont le but serait de chasser les Français de Syrie. Il est mal reçu par Mustapha Kemal très méfiant à l'égard de l'homme et de son passé ; en fait l'incompatibilité entre les deux visions politiques est totale. (...)

Chekib Arslan accorde alors son soutien à l'ambition hachémite d'élever l'émir Faïçal au titre de Khalife des croyants, puis à ses tentatives de se faire proclamer « Roi de tous les Arabes ». Il intervient ensuite dans un sens conciliateur et avec le soutien allemand dans la guerre qui oppose à partir de 1925 hachémites et wahabites." (p. 472-473)

"La deuxième solution envisagée par le gouvernement français consiste à remettre son pouvoir mandataire à la S.D.N., ce qui explique les efforts déployés par Chekib Arslan pour prendre contact avec le Quai d'Orsay à travers des intermédiaires français et pour solliciter l'autorisation de rentrer en Syrie d'où il est banni ; ces tentatives sont entreprises conjointement au nom d'Arslan et de Ihsan Jabri, grand seigneur syrien, son proche collaborateur.

Selon Lévi Provençal des entretiens ont effectivement eu lieu entre 1926 et 1927, menés par le haut-commissaire de France en Syrie, De Jouvenel, avec Arslan et Jabri d'une part, Lotfallah d'autre part. Prêt aux promesses qu'il n'a sans doute pas toujours les moyens d'honorer et qui de plus mettent en jeu les intérêts d'autrui, Chekib Arslan semble disposé en échange de concessions françaises en Syrie, à intervenir pour faire cesser les appuis que recevrait d'Orient Abdelkrim dans le Rif, de même qu'il offre en échange de l'appui italien une intervention pour faire cesser la résistance en Libye.

C'est, si l'on en croit Chekib Arslan, le retour de Poincaré au pouvoir qui met fin au projet de transformation du mandat syrien et aux pourparlers engagés. La province de Syrie est morcelée en républiques libanaise et syrienne et Chekib Arslan n'est pas compris dans les mesures d'amnistie décidées par la France en 1927." (p. 474-475)

"L'amitié de l'émir pour le Duce est dès lors affirmée avec une constance qui ne se démentira plus. Il se rend fréquemment à Rome, est reçu deux fois par le chef du gouvernement italien en février 1934, s'intéresse aux musulmans d'Europe pour lesquels il prépare un congrès qui se tiendra à Genève en 1935 favorablement commenté par la presse italienne qui lui consacre fréquemment articles ou interview. Il collabore à des ouvrages de propagande coloniale italienne et participe à des émissions en langue arabe diffusées par Radio-Bari. Il évite toute référence aux ambitions coloniales italiennes, sur la Tunisie notamment, lorsqu'il commente favorablement en affectant de n'y découvrir que des implications européennes, les accords Laval-Mussolini de janvier 1935, « Traité entre la France et l'Italie relatif au règlement de leurs intérêts en Afrique ». Déjà depuis 1934, il entreprend une apologie de la colonisation Italienne en Erythrée et soutient lors de la conquête de l'Abyssinie que les italiens sont les défenseurs des Ethiopiens musulmans opprimés, tout en affirmant que le conflit éthiopien, guerre entre deux Etats chrétiens, n'intéresse pas les musulmans, puis garde un lourd silence sur les lois racistes et ségrégationistes, promulguées en Ethiopie après la conquête du pays." (p. 478-479)


Anne-Claire de Gayffier-Bonneville, "Renaissance arabe et solidarité musulmane dans La Nation arabe", Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, 95-98 | 2002 :


"Si les manifestations de soutien aux populations opprimées par le colonisateur occidental attestaient un réveil de la nation arabe et devaient à ce titre être encouragées, les efforts des responsables politiques pour apaiser leurs conflits, voire créer les conditions de l'unité politique, devaient tout autant, sinon plus encore, être célébrés [dans La Nation arabe, revue de Chekib Arslan]. La famille hachémite [qui a mené la révolte anti-ottomane et pro-britannique de 1916] était, de ce point de vue, particulièrement louée. Outre le shérif Husayn, elle comptait en effet le roi Faysal, à qui les auteurs de la revue, à l'instar du père, vouaient une véritable dévotion. Il était le « champion et représentant de l'émancipation arabe » ; il avait « fait lui-même l'histoire du réveil arabe. Il en [était] le héros incontestable ». L'homme était sage et perspicace ; la justesse de son appréciation politique et l'équilibre de son gouvernement avaient permis à l'Irak de s'émanciper de la tutelle britannique et d'insuffler au pays une dynamique de développement. La population irakienne lui témoignait dès lors un attachement sincère. Mais, au-delà des Irakiens, les Arabes se reconnaissaient en lui. Il était le guide dont ils avaient besoin, l'homme autour duquel et par lequel l'unité pouvait se réaliser. Les auteurs de La Nation arabe défendaient en effet un projet d'unification des Arabes par étapes. La première consisterait à rassembler l'Irak et la Syrie autour du trône de Faysal. La Syrie, moins avancée que l'Irak, bénéficierait de la sorte des bienfaits du gouvernement irakien. Leur programme rencontrant une certaine opposition dans les rangs syriens qui, d'une part, voyaient en Faysal un souverain trop lié aux Britanniques et, d'autre part, aspiraient à fonder une République, Arslan et Djabri n'hésitaient pas à user de l'argument de la légitimité historique pour contrer leurs détracteurs :

« [...] A-t-il besoin, lui, le Roi Faïçal, d'être sollicité de s'occuper des causes syriennes et palestiniennes ? N'est-il pas encore le Roi légitime reconnu à l'unanimité par le Congrès syrien le 9 mars 1920, dont l'esprit survivra toujours plus intense et plus vif jusqu'à ce qu'un seul règne effectif soit établi sur ces contrées séparées artificiellement et arbitrairement ? ».

Ensuite, défendaient l'émir et son compagnon, l'union s'étendrait à l'Arabie Saoudite et au Yémen « naturellement ». Il faut relever ici l'originalité du projet d'union proposé par Arslan et Djabri. Sans doute les gestes de bonne volonté qu'avaient déjà manifestés les trois souverains avaient-ils favorisé l'élaboration d'un tel schéma. Faysal et Ibn Sa'ûd d'une part cherchaient, malgré la tension générée par les attaques de l'Ikhwan, à établir leurs relations sur des bases harmonieuses : en 1930, La Nation arabe avait salué "le geste heureux" du roi Faysal en direction d'Ibn Sa'ûd auquel l'Emir Abdallah de Transjordanie s'était, contre toute attente, ultérieurement associé ; en 1931, elle évoquait le traité de bon voisinage conclu entre les deux royaumes. Quant au Yémen, la revue célébrait les efforts de l'imam Yahyâ et d'Ibn Sa'ûd pour régler leur différend sur l'Asir. Le retrait à l'automne 1931 des forces d'Ibn Sa'ûd des territoires contestés avait notamment valu aux deux souverains un hommage vibrant : la pureté d'intention des Arabes et leur soif de paix et d'unité se manifestaient pleinement tandis que l'avidité des Européens, par contraste, se révélait crûment.

La mort de Faysal, le 7 septembre 1933, représenta pour les deux auteurs une perte considérable : disparaissait celui qui, à leurs yeux, incarnait le mouvement unitaire arabe. Dans les quatre premiers numéros de la revue, une sorte de feuilleton historique avait retracé l'épopée du royaume arabe de 1920 dans laquelle Faysal tenait le premier rôle. Autour de lui les Arabes s'étaient unanimement rassemblés et, sans la trahison de la France, les Arabes auraient continué à vivre dans la plus parfaite harmonie. Devenue orpheline, la nation arabe devait se trouver un nouveau guide. La figure d'Ibn Sa'ûd [autre figure de la révolte anti-ottomane] s'affirma au fil des numéros pour devenir « l'âme de la nation arabe, le héros du Proche-Orient, le chevalier sans peur et sans reproche, la personnification de toutes les brillantes qualités qui distinguent la race arabe, le grand homme sur la vie duquel reposent toutes nos espérances ». La préservation de l'indépendance de son royaume, les fondements religieux de son gouvernement et son caractère guerrier avaient séduit Arslan (Cleveland, 1985 : 72). (...)

Si, pour les deux rédacteurs du périodique, les Arabes avaient incontestablement, dans la renaissance musulmane, une place privilégiée à occuper, ils n'en reconnaissaient pas moins que certains Etats non-arabes cheminaient avec succès sur la voie de la modernité. La Perse, tout particulièrement, suscitait leur approbation. Plusieurs articles lui étaient dès lors consacrés. Y était notamment loué l'art du shâh qui parvenait à concilier la modernisation du pays et le respect des croyances et des traditions. L'absence de précipitation était, en la matière, fondamentale ; les changements et les réformes n'étaient pas brutalement imposés à la population, à la différence de ce qui pouvait se produire dans d'autres pays. (...)

A l'inverse, la voie suivie par les responsables turcs ne rencontrait pas les suffrages des deux rédacteurs. Les méthodes autoritaires visant à éradiquer les coutumes anciennes étaient vivement condamnées et leur inefficacité grandement soulignée. La politique religieuse de Mustafa Kemal était évidemment, pour les deux hérauts de la renaissance musulmane, jugée avec une sévérité particulière. (...) Ils s'inscrivaient à l'évidence dans la tradition du courant réformiste musulman qu'al-Afghânî avait initié."


Saint-Preux, "En marge de la Commission des mandats : L'Emir Chekib Arslan dit à l'envoyé spécial de l'Humanité les aspirations du peuple syrien : « On nous rendra justice si la politique ne donne pas le coup de grâce à la justice... » ", L'Humanité, 21 février 1926 :

"Rome, 18 février. — (De notre envoyé spécial.) — « Venez donc nous voir ce soir », m'avait dit à l'oreille, l'émir Chekib Arslan, nous pourrons ainsi causer intimement, entre amis », avait-il souligné... tandis qu'El Djabri achevait de reconduire les derniers journalistes bourgeois conviés à l'Hôtel Savoie par la délégation syrienne.

Je fus exact au rendez-vous. Et, dans un petit salon de l' « Albergo Savoïa », où résident les représentants des Comités d'Indépendance syriens, ce fut plus qu'une sèche et froide interview, une conversation à bâtons rompus, effleurant tous les sujets, mais revenant irrésistiblement à la question du jour : les événements de Syrie, et les délibérations du « Salon Jaune » de la Consulta...

Il n'est pas utile de présenter ici à nos camarades l'Emir Chekib Arslan ! Ce délégué de tout ce qui souffre et de tout ce qui gémit sous la botte de l'impérialisme français en Syrie est déjà suffisamment connu par l'inlassable ardeur qu'il met depuis des années, à se faire l'avocat à l'extérieur de la Syrie révoltée.

Quant à Iskan-El-Djabri, nos camarades le connaissent également. Membre fondateur de ce parti du peuple qui lutte tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, compagnon fidèle de l'Emir Arslan, il a déjà dit à l'Humanité, lors de la réunion de Genève, la situation de l'opposition syrienne.

Nous sommes assis autour du guéridon. J'interroge tout de suite :

— Dites-moi votre impression générale sur les conclusions du rapport du gouvernement français à la Commission des mandats ?


— Question un peu délicate. Sachez seulement que le gouvernement français préconise la fondation d'une fédération de certains peuples syriens. C'est tout à fait contraire aux conditions mêmes d'existence du peuple syrien. Car il n'y a qu'un peuple syrien, on ne saurait assez le répéter. Nous sommes trois millions d'Arabes. Seule, la religion nous sépare. Il est donc faux de prétendre que l'unité syrienne est impossible. Toute la tactique du gouvernement français repose sur le vieil adage : diviser pour régner. Il espère en créant des fractions, en élevant des cloisons, entre ce qu'il appelle des peuplades et qui ne forme en réalité qu'un peuple, le peuple arabe, arriver à ses fins et satisfaire son despotisme... son calcul est déjà déjoué.

— Le Liban ne réclame-t-il pas son indépendance ?


— La vérité c'est que les 300.000 Maronites dont je vous parlais tout à l'heure veulent vivre indépendants. Eh bien (et voilà une preuve de notre bonne volonté) nous sommes prêts à reconnaître cette indépendance de l'Etat du Liban. Mais il faut que parallèlement l'Unité de l'Etat syrien, de notre peuple soit reconnue, qu'un Etat autonome fonctionne, qu'une Constituante unique soit élaborée. Et de cela nous faisons une condition essentielle, primordiale, des pourparlers avec la France...

— Et sans cela ?

— Sans cela, la guerre continuera.

— Et si cette indépendance vous était reconnue, si cette unité était garantie...


— Alors — et l'Emir Arslan scande les mots — ce serait la paix immédiate. Je vais même plus loin : nous serions prêts à collaborer avec la France, prêts à lui reconnaître le privilège exclusif d'exploiter les richesses de notre sol... Malheureusement...

Et Chekib Arslan a un geste significatif." (p. 1-2)


D. Le Lasseur, "Les négociations du traité franco-syrien : Le but que poursuivent, en Syrie, les ennemis de la France", Le Figaro, 19 décembre 1932 :


"Quiconque a séjourne en Syrie en 1920 et 1927, a entendu parler de l'émir Chekib Arslan, bras droit du fameux Djemal pacha qui, pendant la guerre, faisait pendre haut et court, sans autre forme de procès, tous les Syriens susceptibles de pactiser avec la France.

Lorsque nous reçûmes le mandat syrien, Chekib Arslan tenta de fomenter de toutes parts des révoltes, mais craignant, dit-on, les représailles de ceux dont il avait fait tuer les pères, les frères ou les fils, il quitta la Syrie, y laissant des émissaires en liaison constante avec lui et s'installa à Genève. Là, il cherche, depuis plusieurs années, à susciter des complications à la France dans le domaine de la S. D. N. J'ai voulu connaître ce nationaliste fanatique, ennemi acharné de notre pays. Près du Parc des Eaux-Vives, dans une maison très moderne, une ravissante fillette de quatre ans, aux yeux veloutés, vint m'ouvrir. Elle tenait par la main sa jeune sœur âgée de trois ans. Avec l'intelligence précoce des enfants orientaux, elle me pria d'entrer, s'installa avec moi au salon et me parla d'elle et de sa sœur en attendant l'arrivée de son père qui, d'ailleurs, ne tarda guère.

Agé d'une cinquantaine d'années, mince et grisonnant, l'émir est, à première vue, il faut le reconnaître, éminemment sympathique. Il s'exprime avec élégance et courtoisie. La conversation s'engage sur un ton d'aménité parfaite.

« J'ai vu M. Ponsot samedi dernier et notre entrevue a été féconde », déclare mon hôte.

— Votre inimitié avec la France ne va donc pas jusqu'à refuser de conclure un traité avec elle ?

— Au contraire. J'ai été le premier à suggérer aux nationalistes syriens de s'entendre avec la France. J'ai présenté en 1925, à M. de Jouvenel, après la révolte syrienne, un projet qui pouvait concilier les deux thèses : j'y proposais, pour trente ans, l'alliance des deux pays. Le français devenait la langue obligatoire ; des techniciens français étaient engagés, à l'exclusion de tous les autres étrangers ; les emprunts ne pouvaient être contractés qu'en France, etc... En somme, ce projet contenait les éléments essentiels du traité que la France nous soumet aujourd'hui. Je ne peux donc qu'approuver votre texte s'il est conforme, comme on le prétend, au traité anglo-irakien. « C'est un protectorat déguisé », disent certains. Eh bien, nous voulons le même protectorat que les Irakiens et avec les mêmes libertés. Il y a cependant un point sur lequel je ne suis pas d'accord avec M. Ponsot. Pourquoi séparer du royaume syrien le Djebel Druse qui compte seulement 6.500 habitants, et les Alaouites dont le nombre n'est que de 150.000 ? Pour le Liban, c'est une autre affaire et, bien qu'économiquement il ne puisse vivre sans nous, nous admettons qu'il reste en dehors du nouvel Etat. Seulement nous tenons absolument à ce que dans le traité soit notifié de façon formelle que le Djebel Druse et les Alaouites auront l'autonomie locale dans le sein de l'unité syrienne. De cette façon, le royaume syrien aura un débouché maritime et pourra vivre.

» Quant à la période de transition que vous réclamez, j'admets qu'elle soit nécessaire pendant trois ou quatre ans, mais je voudrais que, pour apaiser les esprits, la France déclarât sans délai, officiellement, sa décision d'offrir à la Syrie un traité reposant sur les mêmes bases que le traité anglo-irakien. »

Mon interlocuteur parle d'abondance. Je lui fais observer que, dès 1920, les représentants de la France à Beyrouth avaient pensé à remplacer le mandat par un traité, graduellement, à plus ou moins longue échéance. Le traité actuel est l'aboutissement logique de toute notre politique en Syrie et rien de plus. S'il a fallu attendre jusqu'aujourd'hui pour qu'il prenne forme, la cause en est que les Syriens n'ont point été capables, dans le passé, de se donner un gouvernement représentant réellement la nation. Quant aux objections des nationalistes extrémistes au sujet du Djebel Druse et les Alaouites, j'y réponds en rappelant à l'émir Chekib Arslan que, depuis 1920 — conformément aux recommandations inscrites dans le mandat — nous leur avons reconnu des gouvernements autonomes. Nous n'allons donc pas les abandonner la domination de Damas. Il faut voir d'abord comment fonctionnera le nouvel Etat. Plus tard, si les gouvernements du Djebel Druse et de Lattaquié veulent s'agréger à l'Etat de Syrie tout en conservant les libertés locales qu'ils jugeront nécessaires, nous n'y contredirons pas, à la condition, bien entendu, qu'il s'agisse d'un accord et non pas de la volonté du plus fort imposée au plus faible. D'ailleurs, l'émir Chekib Arslan réduit singulièrement l'importance des pays qu'il veut faire entrer, immédiatement et obligatoirement, dans l'unité syrienne, puisque le Djebel Druse est peuplé de 60.000 habitants et non de 6.500, et le gouvernement de Lattaquié d'environ 300.000, dont 200.000 Alaouites !...

J'interroge à nouveau :

— Quels sont, en réalité, les avantages que vous retirerez de la combinaison envisagée ?

— Les mêmes avantages que l'Irak. Nous serons libres, et, éventuellement, protégés contre les Turcs s'ils voulaient s'emparer d'Alexandrette, d'Alep ou d'Antioche.


— Et quelle contre-partie nous offrez-vous ?

— L'Angleterre n'a posé qu'une condition : un aérodrome pour ses avions. Nous vous concédons les mêmes facilités.

Ces paroles me paraissent n'avoir avec la vérité qu'un contact bien partiel : l'Angleterre a imposé à l'Irak, de surcroît, d'autres restrictions de souveraineté assez notables. Je proteste et invoque en faveur de la France les dépenses considérables effectuées par elle en Syrie. Cette fois, j'ai trouvé le point sensible. L'amabilité du grand seigneur arabe disparaît. Mon hôte change de ton : « Que nous importent vos dépenses ? Vous n'aviez qu'à ne pas venir, à ne pas vous comporter, chez nous, en colonisateurs... » Et de déblatérer, d'invectiver contre l'impérialisme, le militarisme, l'égoïsme, le chauvinisme français...

Laissant libre cours aux sentiments qu'il avait jusqu'ici contenus, l'émir me révèle qu'il compte préparer l'unité de la Syrie et de l'Irak, en faire « une Autriche-Hongrie de l'Orient », ayant un seul gouvernement et une seule armée.

Je m'exclame : « Que deviendrait alors l'alliance de la Syrie et de la France, puisqu'elle se trouverait en concurrence avec l'alliance de l'Angleterre et de l'Irak ?

— Elles pourraient subsister toutes deux : la France et l'Angleterre n'auraient qu'à s'entendre...

En réalité, les conceptions politiques de l'émir Chekib Arslan se résument en ceci :

Demander à la France de prendre la responsabilité de protéger la Syrie contre les Turcs
sans lui donner en échange aucune espèce d'avantage ou de droit même pas le droit de veiller au bien-être des minorités (Druses, Alaouites, Ismaëlyès, chrétiens).

Cependant, la constitution d'un royaume arabe, irako-syrien, permettrait bientôt à Chekib Arslan et à ses pareils de secouer les derniers reliquats de notre influence." (p. 4)


W. R. Rankin, "“Espionnage 1936” ou les dessous de la politique européenne", L'Express de Mulhouse, 10 juin 1936 :

"L'EMIR CHEKIB ARSLAN

A bord du « Mariette Pacha », parmi les nombreux passagers, on pouvait voir plusieurs individus dans le genre de Gardner et aussi quelques civils, dont l'élégance raide trahissait l'habitude de porter l'uniforme. Mais, je remarquais surtout un passager de marque : l'Emir Chekib Arslan. Cet homme aux yeux bridés, dont le visage mince, barré d'une petite moustache porte toute la duplicité et toute la fourberie orientale est le plus redoutable agent anglais et le roi des agitateurs. Son action est considérable et ses moyens illimités.

Bien qu'originaire de Syrie, Chekib Arslan fut expulsé du territoire par le haut-commissaire français en raison de ses campagnes contre la France, non pas seulement en Syrie, mais dans tous les pays où la religion d'Islam exerce encore son influence. Il a créé avec l'appui matériel du colonel Lawrence, en 1924, un comité syro-palestinien dont il est le chef incontesté et dont l'action funeste a été considérable dans les événements de Syrie. Par la suite ce comité syro-palestinien, qui a son siège à Genève, devint le comité syro-palestinien-moghrebien et il étendit son action sur toute l'Afrique du Nord.

Disposant de l'argent anglais, agitateur officiel que l'Angleterre entretient pour gêner l'action de la France en pays islamiques, Chekib Arslan publie une revue mensuelle : « La Nation Arabe », qui est l'organe de la propagation de l'idée de soulèvement et de l'indépendance des pays islamiques. Cette publication s'attache notamment, et cela dans un but d'excitation ouvertement poursuivi, à faire grief aux indigènes de l'Afrique du Nord de leur longue passivité en la comparant à l'attitude pleine d'action réelle des Egyptiens.

Cette revue sert, en outre, de trait d'union entre le comité syro-palestinien-moghrebien et la société panislamique dénommée Djemiet Hadaret el Islamia, qui a son siège et son foyer ardent au Caire.

UNE ACTIVITE ANTI-EUROPEENNE


Après avoir beaucoup travaillé à Genève, lors de la révolution en Espagne, l'Emir faisait au Maroc espagnol une tournée de conférences et, en présence des autorités civiles et militaires, il ne craignait pas de déclarer : « Qui a fait l'Espagne ? Vous les Maures ! Qu'y a-t-il de plus beau en Espagne ? Ce que les Maures ont fait ! Qu'y a-t-il de pourri, de vil et de laid ? Ce que les Européens ont greffé sur l'oeuvre de nos ancêtres ! » Personne à Tétouan ou à Ceuta, parmi les officiels, ne se leva pour interdire à l'agitateur de continuer et, celui-ci, plissant dédaigneusement les lèvres, poursuivait : « J'ai mis ma fortune et toutes mes facultés intellectuelles au service de notre idéal, en ralliant d'abord toutes les bonnes volontés. Je vous adjure de m'aider en joignant vos efforts aux miens et à ceux de tous les véritables musulmans qui font déjà partie de mon groupement appelé à soutenir les nations arabes dans une lutte ayant pour but de reconstruire l'empire arabe, où régneront la loi et le Chrâa ».

Du Maroc espagnol, l'Emir se rendit à Tanger où il fut expulsé puis à Madrid où, malgré les appuis qu'il avait, il n'obtint pas l'abandon du Maroc. Il repartit ensuite pour Genève et installa peu après, à Lausanne, les magnifiques bureaux que lui a payés l'« Intelligence Service ». Grâce à l'appui des Anglais, l'Emir devint à la Société des Nations, le représentant des minorités musulmanes, si invraisemblablement que cela puisse paraître et il reste l'homme de toutes les besognes pouvant nuire au prestige de la France, l'apôtre des libertés musulmanes, dans les pays où l'Angleterre n'a pas planté ses couleurs."


Gabriel-Louis Jaray, "La politique indigène en Algérie : conflits récents et causes profondes", Mercure de France, 1er novembre 1938 :


"La France enfin se trouve en présence d'agitateurs internationaux, auxquels elle donne parfois libre carrière. Ces masses indigènes sont à la fois ardentes et apathiques ; elles bondissent dans le carnage et retombent dans le silence. C'étaient autrefois les marabouts qui les entraînaient à la guerre sainte et au pillage ; elles semblaient tout d'un coup enivrées, comme en transes, et se ruaient sur leurs proies. Aujourd'hui, ce sont des chefs improvisés, qu'on peut souvent soupçonner d'être agents de propagandes étrangères allemande, communiste ou islamique, qui se rejoignent dans l'action. Chaque période électorale, chaque crise, chaque grève, constitue un tremplin pour lancer leurs appels. L'autorité française a plus d'une fois laissé faire, sous couleur de respect de la liberté politique, religieuse ou syndicale. C'est souvent à Paris même que s'organisent ces groupements anti-français, sous le regard nonchalant des autorités et parfois avec la sympathie d'hommes politiques soit ignorants, soit serviteurs de groupes nord-africains, qui leur apporte en France l'appui d'hommes résolus. (...)

C'est aussi à Genève et en Orient que se trouvent les inspirateurs de ces campagnes, tels l'émir Chekib Arslan, le syrien Djabri Bey. Ils ont constitué auprès de la Société des Nations une délégation dite syro-palestinienne qui cherche à unifier la politique musulmane et à lui assurer des appuis. La Grande-Bretagne l'a soutenue de ses fonds pour fortifier aux Indes les musulmans contre les Hindous de Gandhi, mais ces mêmes fonds ont servi à favoriser l'agitation en Algérie et la politique anti-française de cette Délégation (7). (...)

(7) Son organe Nation arabe a consacré son numéro de septembre-octobre 1934 à l'Allemagne ; la France y est chargée de toutes les responsabilités ; Chekib Arslan s'est lié avec l'Italie, a pris contact avec les délégués du Gouvernement italien en avril et en septembre 1934, a visité l'Erythrée et à son retour adresse ses félicitations au gouvernement italien et ajoute : « Toutes les oppressions des colonialistes ne comptent guère auprès de l'oppression française. » (La Crise de l'Afrique du Nord, p. 38 et 39.)" (p. 576-577)


Pierre Canis, "La “politique musulmane” et notre Afrique du Nord", L'Ouest-Eclair, 19 décembre 1934 :

"Il existe à Genève une délégation syro-palestinienne dont les chefs bien connus sont Chekib Arslan et Djabri Bey.

Tous deux dirigent la politique musulmane, c'est-à-dire qu'ils décident de l'attitude des populations musulmanes à l'égard des puissances européennes mandataires ou protectrices.

Durant tout l'été ils ont voyagé en Orient : Chekib Arslan a fait partie de la commission d'arbitrage dans le conflit entre le Hedjaz et le Yémen ; Djabri Bey s'est rendu en Palestine
pour prendre contact avec les nationalistes syriens. Le premier a vu Mussolini à l'aller et au retour ; il s'est aussi arrêté dans la colonie italienne de l'Erythrée. Quant au second, il a pris contact en Palestine avec les autorités britanniques.

Ces voyages ont été employés à fixer les grandes lignes de la « politique musulmane », et nous avons le regret de constater, de l'aveu même des chefs de la délégation, que l'ennemi principal assigné aux Musulmans, celui qu'ils doivent abattre en premier lieu, c'est la France.

Nos adversaires estiment, en effet, que nous sommes les plus vulnérables par l'étendue de nos possessions africaines et surtout en raison de notre situation intérieure qu'ils jugent difficile.

C'est l'Afrique du Nord qu'ils veulent tout d'abord nous arracher. Pour le moment, on nous laissera tranquilles en Syrie, non par sympathie pour nous, mais parce qu'il est difficile de soulever la Syrie seule, sans agiter la Palestine, le Hedjaz, l'Irak, et sans menacer par conséquent les intérêts anglais.

A l'égard de l'Italie, Chekib Arslan est rempli d'indulgence. Il aurait, lors de son passage en Erythrée, noté « la satisfaction des Musulmans de se trouver sous une administration aussi bienveillante que celle de l'administration italienne », alors que dans le numéro d'octobre de sa revue La Nation Arabe, il prétend, par contre, que « toutes les oppressions des colonialistes ne comptent guère auprès de l'oppression française ».

Cette même revue montre aussi la position adoptée par Chekib Arslan vis-à-vis de l'Allemagne. Il rejette sur nous la responsabilité du déclenchement de la dernière guerre ; il excuse l'Allemagne de manquer aux engagements financiers du traité et des conventions suivantes, et juge son attitude beaucoup moins répréhensible que celle de la France qui ne paie pas ses dettes à l'Amérique. Jamais encore la délégation syro-palestinienne n'avait pris parti contre nous au bénéfice d'autres pays avec tant de netteté.

Il n'est pas interdit de penser que des subsides importants donnés par certaines nations à cette délégation dont les ressources avaient beaucoup diminué depuis la mort du roi Fayçal — ne sont pas étrangers à l'orientation actuelle de sa politique.


Quoi qu'il en soit, retenons que la délégation syro-palestinienne s'est mise au service de l'Allemagne et de l'Italie et qu'elle les aidera à atteindre leurs objectifs particuliers.


Elle dispose malheureusement de certains moyens : elle peut, en effet, agir sur l'esprit des Musulmans d'Europe comme sur celui des chefs nationalistes de l'Afrique du Nord ; elle
inspire le Comité clandestin du Caire et le Comité Islamique de Jérusalem.

C'est beaucoup plus qu'il n'en faut pour allumer la haine au coeur des Musulmans qui sont nos sujets ou nos protégés." (p. 2)


Voir également : La révolution jeune-turque et les minorités ethno-religieuses

Famines du Liban et de la Syrie : le témoignage du grand-père maternel de Walid Joumblatt

Le nationalisme turc est-il la cause de la Grande Révolte arabe de 1916 ? 
  
Mehmet VI et le califat ottoman dans le jeu de l'impérialisme britannique

Citations de Mehmet VI Vahdettin (le dernier sultan ottoman)

La francophilie de Mehmet VI (dernier sultan ottoman) et d'Abdülmecit II (dernier calife)

Rencontre avec Abdülmecit II (1922)

Le contexte de l'abolition du califat en Turquie (1924)

 
Le triangle Vahdettin-Kemal-Enver dans le contexte du conflit entre l'Entente et la Russie bolcheviste

L'opposition du Parti républicain progressiste (1924-1925)
  
Les révoltes réactionnaires kurdes dans la Turquie de Mustafa Kemal

L'instrumentalisation de la "carte kurde" par la Perse de Reza Shah Pahlavi

Alexandrette, Mossoul, Ourmia : les politiques suivies par Mustafa Kemal Atatürk

Le facteur kémaliste dans les révoltes anticoloniales en Syrie

Le nationaliste libyen Abdul Salam al-Buseiri et la Turquie kémaliste

mercredi 17 juin 2020

Citations de Süleyman Demirel




Entretien au journal Orient, 12 octobre 1967 :

"Je pense que nos relations avec les Soviétiques sont entrées dans une nouvelle ère. Comme vous le savez, de vives tensions ont marqué les relations entre nos deux pays au cours des années, et après la fin de la dernière guerre mondiale nous n'avions, pour ainsi dire, plus de relation. Le rapprochement avec Moscou n'influencera en rien les relations entre la Turquie et les Etats-Unis ou les autres alliés de l'OTAN. Nous cherchons à nous faire des amitiés et non à perdre celles que nous avons."


Entretien au Monde, 20 mai 1975 :


"A vrai dire, Chypre n'est pas aujourd'hui un problème entre nous et la Grèce. On a poussé la Turquie à intervenir à Chypre. Tout a commencé par la violation de traités internationaux. Les traités résultent d'événements importants. Si vous les violez, vous devez en supporter les conséquences. Chypre a été une affaire très chaude entre 1950 et 1960. A cette époque, on pouvait s'attendre à la guerre d'un jour à l'autre. Puis la diplomatie a pris le dessus et l'Etat indépendant de Chypre a vu le jour sur la base des traités de Londres et de Zurich. Vint Mgr Makarios. D'où tenait-il le pouvoir qui en a fait le président de Chypre sinon des traités ? Et la première chose qu'il a faite fut de les violer. Qui a détrôné Makarios ? La garde nationale et les officiers grecs, qui n'auraient pas dû être là d'après les traités. En fin de compte, Mgr Makarios est tombé dans le trou qu'il avait lui-même creusé. Alors, que devions-nous faire ? Devions-nous rester à Chypre et attendre que Sampson ait tué des milliers de Turcs chypriotes ? En réalité, pendant quinze ans, Mgr Makarios a continuellement violé les accords internationaux et nous avons fait preuve de la plus grande patience."

"Nos relations avec les Etats-Unis passent par une phase d'attente. Nous espérons que le Congrès américain changera d'attitude à notre égard parce que la décision qu'il a prise est inexplicable. Le gouvernement américain ne l'explique, d'ailleurs, pas lui non plus. L'embargo [sur les armes] décidé par le Congrès est une décision hostile. Nous n'avons pas de conflit direct avec les Etats-Unis. Nous n'avons pas violé les accords conclus avec eux. Nos relations avec les Etats-Unis sont fondées sur des avantages et une amitié mutuels. De notre côté, nous avons fait face à nos obligations. Tout ce que nous demandons aux Américains, c'est de corriger une décision surprenante et inexplicable."

"Avec les Soviétiques, nous avons établi des relations de bon voisinage. Nous ne pouvons ignorer leur présence et leur proximité. Nous ne leur créons aucun ennui si eux-mêmes ne nous en créent pas. Mais nous voulons protéger notre mode de vie et notre régime. Nous ne nous mêlons pas des affaires intérieures de nos voisins. Sur cette base, pourquoi n'aurions-nous pas de bonnes relations ?"


Déclaration, cité dans le Time, 10 février 1992 :


"La position de la Turquie est de convaincre nos partenaires [en Asie centrale] de rester laïques et de passer à l'alphabet latin."


Adresse à une délégation ouzbèke, cité dans la revue Türkiye, 29 février 1992 :


"Je salue la renaissance d'un monde turc qui s'étend de l'Adriatique à la mer de Chine."


Déclaration, cité dans Le Figaro, 13 avril 1992 :

"Nous disons aux habitants de cette région [l'Asie centrale] que notre modèle de développement, fondé sur un système laïque, un islam modéré et la maîtrise de l'initiative privée, pourra les aider car nous avons opté pour les valeurs occidentales qui sont synonymes de croissance de niveau de vie, tout en gardant l'individualité de la nation."


Déclaration lors d'un voyage dans les républiques turcophones d'ex-URSS, cité dans Le Monde, 6 mai 1992 :

"Personne ne peut nier qu'il existe un monde turc qui s'étend de l'Adriatique à la Muraille de Chine."


Déclaration, cité dans BBC Summary of World Broadcasts, 2 février 1994 :


"La Turquie est un pont important dans une région qui va de l'Ouest à l'Est, c'est-à-dire de l'Europe à la Chine."


Voir également : Citations de Bülent Ecevit

Chypre : "Nul ne peut nier qu'il n'ait existé quelque chose d'irrationnel, de passionné, dans le choix du camp grec."

Le terrorisme arménien contre les démocraties

Citations du colonel Alparslan Türkeş

La stratégie "néo-ottomane" du parti MHP

Le panturquisme

La Turquie entre trois mondes

Chronologie de la géopolitique turque

L'américanophilie d'une partie des nationalistes turcs en 1919




Paul Dumont, Mustafa Kemal invente la Turquie moderne, Bruxelles, Complexe, 2006, p. 49-50 :

"Cette fois encore, c'est Mustafa Kemal qui assure la présidence du Congrès [de Sivas]. La tâche assignée aux délégués est relativement simple : il leur est demandé d'examiner et de ratifier les décisions prises à Erzurum. Toutefois, comme à Erzurum, les débats se dérouleront dans un climat singulièrement tendu. Ce ne sont pas les résolutions du précédent congrès qui sont en cause : celles-ci seront entérinées, moyennant certaines modifications de détail, dès le début des travaux. La principale source de zizanie est ailleurs : un rapport préparé par certains délégués et demandant que la Turquie soit placée sous le mandat des Etats-Unis.

La question d'un éventuel recours à une tutelle étrangère avait déjà fait l'objet de longues discussions lors du congrès d'Erzurum. Ces discussions avaient abouti à une déclaration finale extrêmement ferme : « Nous sommes prêts à ménager un accueil empressé au concours scientifique, industriel et économique de n'importe quelle puissance, pourvu qu'elle respecte nos sentiments nationaux et qu'elle ne nourrisse pas de desseins impérialistes à l'égard de notre pays. Il ne saurait être question pour nous d'accepter un mandat ou un protectorat ». Dans l'intervalle, cependant, grâce à l'activité déployée par l'écrivain Halide Edip [épouse d'Adnan Adıvar (futur cadre du Parti républicain progressiste), elle sera par ailleurs élue députée sous l'étiquette du Parti démocrate d'Adnan Menderes] et certains autres admirateurs des Etats-Unis, l'idée d'un mandat américain avait gagné du terrain. A Sivas, ce sont quelques-unes des personnalités les plus en vue du mouvement de résistance qui militeront en faveur d'une inféodation aux Etats-Unis : Hüseyin Rauf [Rauf Orbay], Refet Bey [Refet Bele], le délégué de Tokat Bekir Sami [futurs cadres du Parti républicain progressiste], le délégué d'Ankara Ismail Fazıl Pacha [décédé en 1921] et d'autres. Ils s'agitent avec d'autant plus de vigueur qu'un correspondant du Chicago Daily News, Louis E. Browne, venu en apparence pour « couvrir » le congrès, leur a promis monts et merveilles : l'installation d'un réseau d'écoles modernes, la prospérité économique, le progrès social, un système politique à l'américaine, etc. Attisée par des pressions en provenance de l'Association pour la diffusion des principes wilsoniens dirigée par Halide Edip, la lutte entre partisans et adversaires du mandat américain prendra très vite mauvaise tournure et sera même sur le point de faire capoter le congrès."

Voir également : Les reculs et les renoncements d'Abdülhamit II

Citations de Mehmet VI Vahdettin (le dernier sultan ottoman)

Rencontre avec Abdülmecit II (1922)

Halide Edip Adıvar : féministe, musulmane, nationaliste turque

Le général Kâzım Karabekir et les Arméniens
  
Heath W. Lowry, "American Observers in Anatolia ca. 1920 : The Bristol Papers"
  
Bekir Sami Kunduh : entre racisme anti-arménien et pragmatisme

L'opposition du Parti républicain progressiste (1924-1925)

Les nations britannique et américaine, vues de Turquie

Chronologie de la géopolitique turque

samedi 13 juin 2020

Les craintes (vaines) de David Ben Gourion quant à l'émergence d'un "Atatürk arabe"




David Ben Gourion, discours à la Knesset, 2 avril 1957, source : Kennett Love, Suez : The Twice-Fought War : A History, New York, McGraw-Hill, 1969, p. 676 :

"J'ai toujours redouté qu'une personnalité se lève comme les dirigeants arabes au VIIe siècle ou comme [Kemal Ataturk] qui a surgi en Turquie après sa défaite lors de la Première Guerre mondiale. Il leur a remonté le moral, a changé leur caractère et en a fait une nation combative. Il y avait et il y a toujours un danger que Nasser soit cet homme."

Voir également : Qui était Mustafa Kemal Atatürk ?

Kemal Atatürk, David Ben Gourion et Charles de Gaulle

David Ben Gourion et la Turquie

L'engagement de Moshe Sharett dans l'armée ottomane

Israël, héritier de l'Empire ottoman

La Turquie d'İsmet İnönü et le conflit israélo-arabe

L'accord entre Adnan Menderes et David Ben Gourion (1958)

La Turquie d'İsmet İnönü et le conflit israélo-arabe




Marc Marceau, "La Turquie peut jouer un rôle important dans la recherche d'une solution", Le Monde, 6 janvier 1949 :

"Ankara, 5 janvier. - M. Hussein Yaltchin, journaliste éminent et leader du parti du peuple, a été désigné pour représenter la Turquie à la commission de conciliation pour la Palestine.

Quarante suffrages à l'assemblée des Nations unies ont désigné la Turquie pour une mission de médiation particulièrement délicate dans le conflit palestinien. Il faut reconnaître que peu de nations étaient plus indiquées que celle-ci pour une pareille tâche. L'action de la délégation turque peut donc se révéler fort importante et provoquer une solution à la guerre qui ensanglante la Terre sainte.

Pays essentiellement musulman la Turquie calmera certainement les inquiétudes des pays arabes. Elle a constamment voté contre le partage, pour le plan de fédération proposé par la Syrie, et cette position, surtout de principe, sera probablement celle qu'adopteront ses représentants. Ceux-ci défendront par conséquent, mais dans la mesure du possible, la cause arabe. La Turquie a sans doute grand intérêt à voir la Transjordanie s'agrandir et l'Etat d'Israël quelque peu limité dans ses futures frontières. Un Etat juif trop puissant, et surtout "gauchisant", aurait peut-être tendance à vouloir maintenir l'équilibre entre les deux grands blocs idéologiques au risque de provoquer de violentes réactions sociales dans ces régions. Malgré cela la Turquie est un pays beaucoup trop réaliste pour ne pas tenir compte qu'Israël est le troisième client de son commerce extérieur, et qu'économiquement il possède de réelles possibilités d'avenir. Les Turcs ont donc tout intérêt à ménager les Juifs, à s'en faire des alliés ou tout au moins un facteur neutre et bienveillant.

Dans les grandes lignes la Turquie s'inspirera certainement de la position de son alliée britannique, tout en évitant soigneusement de susciter des réactions par trop hostiles dans l'opinion publique américaine."

Voir également : Thrace, 1934 : la lutte implacable d'İsmet İnönü et Şükrü Kaya contre l'agitation pogromiste locale

İsmet İnönü et les ressortissants juifs de Turquie

Seconde Guerre mondiale : le sauvetage des Juifs d'Europe par la Turquie kémaliste

La Turquie kémaliste face à l'expansion de l'Axe dans les Balkans
  
 
La neutralité turque pendant la Seconde Guerre mondiale

Les antisémites arméniens croient dans l'existence d'un "complot juif" derrière la Turquie (hamidienne, unioniste et kémaliste), l'Allemagne wilhelmienne et la révolution bolchevique

L'accord entre Adnan Menderes et David Ben Gourion (1958)

Turgut Özal et Israël

Le MHP, Israël et les Juifs

Chronologie de la géopolitique turque

mercredi 10 juin 2020

Le programme des Jeunes-Turcs sous la République kémaliste




"En Turquie : Le complot contre Mustapha Kemal : Révélations d'un accusé", Le Gaulois, 12 août 1926, p. 3 :

"Angora, 11 août.

Le tribunal de l'indépendance a jugé aujourd'hui Djavid Bey, ministre des finances.

Djavid Bey a déclaré avoir été obligé de se cacher à la suite des arrestations opérées après l'armistice par les forces d'occupation alliées sous le gouvernement de Damad-Ferid Pacha, puis de s'enfuir à bord d'un bateau français pour Marseille et la Suisse.

Il a affirmé formellement être resté depuis à l'écart de la politique mais a reconnu néanmoins ses contacts, en Suisse, avec Talaat et Cherif Pacha. Il a prétendu que ce dernier a renoncé à la suite de ces conversations à son projet dans le Kurdistan.

Exposant son activité après son retour en Turquie, il a reconnu que le programme du comité Union et Progrès avait été élaboré chez lui mais il a dénié toute participation aux réunions politiques."


"Dans le Proche-Orient", Le Temps, 18 août 1926, p. 1 :

"Le procès des unionistes turcs

Le cas de Djavid bey


Notre correspondant particulier à Constantinople nous écrit :

L'un des principaux inculpés qui paraissent devant le tribunal d'indépendance est l'ex-ministre des finances Djavid bey, actuellement délégué turc auprès de la dette publique ottomane et qui, à la veille de la guerre mondiale, vint conclure à Paris, au nom de son gouvernement, un emprunt de 500 millions de francs.

L'accusation lui reproche d'avoir reçu à diverses reprises chez lui tout un groupe d'unionistes des plus connus, dans le but de combattre et de renverser le régime kemalisle. Interrogé déjà à ce sujet lors du procès de Smyrne, Djavid bey avait reconnu qu'au printemps de 1923 une quinzaine de ses « camarades » de l'Union et progrès s'étaient réunis dans sa maison de Chichli.

Les faits se seraient déroulés de la manière suivante :

C'était l'époque de préparation des élections pour la deuxième Assemblée nationale et les leaders unionistes avaient chargé l'un des leurs, l'ancien ministre du ravitaillement Kara Kemal, d'aller solliciter du ghazi, qui se trouvait alors à Ismidt, la permission de collaborer avec le parti officiel de la défense des droits, créé par Moustapha. Kemal. Cependant, ce dernier déclara refuser tout concours de la part d'un groupe unioniste quelconque. C'est pourquoi, dès le retour de Kara Kemal à Constantinople, Djavid bey manda chez lui ses « camarades » afin de leur communiquer les résultats de l'entrevue d'Ismidt. Au cours de cette réunion, les chefs unionistes auraient pris simplement la décision de ne pas participer aux élections de l'Assemblée nationale au nom de leur organisation, mais de laisser chacun d'eux, à titre individuel, collaborer avec les kemalistes.

L'accusation réplique à ces allégations que des conciliabules semblables ont eu lieu non pas une fois seulement, mais à plusieurs reprises et même la nuit ; leur but n'aurait été autre que l'élaboration d'un nouveau programme politique destiné à contrecarrer celui du gouvernement. Le fait est qu'au cours des perquisitions faites chez l'un des leaders unionistes arrêtés, le docteur Nazim (l'un des fondateurs de l'Union et progrès), la police a saisi un exemplaire d'un programme en neuf articles. Interrogé à nouveau à Angora à ce sujet, Djavid bey a finalement reconnu que ce document avait été discuté et rédigé chez lui au cours de la réunion dont nous avons parlé.

Voici les points les plus importants de ce programme. Le premier article se rapporte à la reconstitution de l'Union et progrès, « parti radical, partisan des libertés ». Le second proclame, tout comme la Constitution kemaliste, que « la souveraineté et le pouvoir appartiennent exclusivement à la nation ». Mais les articles 4, 5 et 6 renferment nombre de dispositions qui sont en contradiction flagrante avec le statut organique actuel. L'Union et progrès se prononce en somme pour l'institution de deux Chambres, un Sénat et un Parlement, et pour Constantinople contre Angora comme capitale du pays. D'autres articles, qui ont trait à la question du régime : rétablissement du sultanat, c'est-à-dire de la monarchie, maintien de la république, s'inspirent du plus pur opportunisme. En hommes pratiques, les unionistes semblent chercher, avant tout à se plier aux circonstances.

Ce programme, en lui-même ne constitue pas, ainsi que l'a nettement déclaré le procureur général, un acte puni par la loi. Mais de l'idée à l'acte il n'y a souvent qu'un pas. Et ce pas aurait été franchi par les unionistes, selon l'accusation. Djavid bey et ses amis, réunis en secret, auraient déjà commencé « à faire passer les articles du programme du domaine des idées pures dans celui des réalisations ». Au nom d'une association officiellement dissoute, ils auraient, par des agissements occultes, non seulement épié toutes les occasions pour s'emparer du pouvoir, mais mis en oeuvre tous les moyens de complot, et l'attentat y compris, pour renverser le régime kemaliste. — P. G."


"Le complot de Smyrne : L'ex-ministre Djavid bey et trois de ses complices sont condamnés à mort : Ils étaient accusés d'avoir conspiré pour s'emparer du pouvoir par un attentat", Le Matin, 27 août 1926, p. 1 :


"Le tribunal d'indépendance d'Angora, après avoir siégé trois semaines, a terminé le procès des membres de l'Union et Progrès, le fameux parti de Talaat, Diemal et Enver pachas, le parti qui, en 1908, avait renversé l'absolutisme en Turquie et qui, plus tard, acquis à l'Allemagne par Guillaume, avait entraîné dans la guerre l'empire ottoman.

La fin de l'Union et Progrès, dont les partisans avaient longtemps gouverné la Turquie, est particulièrement tragique. Déjà, il y a quelques années, deux de ses grands chefs, Djemal et Talaat pachas étaient, morts assassinés par des Arméniens ; Enver pacha succombait dans le Turkestan, alors qu'il tentait de soulever contre les soviets les peuples islamiques de l'Asie ; tout récemment, Kara Kemal, ancien ministre du ravitaillement, sur le point d'être arrêté à Stamboul pour avoir comploté l'assassinat de Mustapha Kemal, se tirait une balle dans la tête. Aujourd'hui, le tribunal d'indépendance condamne à mort Djavid bey, ancien ministres des finances, le grand cerveau des unionistes ; Nazim bey, ex-ministre de l'instruction publique, qu'on avait souvent appelé le véritable fondateur du parti, et deux députés, amis de Djavid bey.

Mustapha Kemal a réussi ainsi à se défaire d'une puissante opposition à son régime de dictateur. Dès le lendemain de la victoire du ghazi sur les Grecs, les unionistes avaient aspiré à partager le pouvoir avec les nationalistes. Mais le dictateur refusa leur appui et, en 1923, il répondit rudement à Kara Kemal qu'il n'avait pas besoin de sa collaboration.

C'est alors que Djavid bey réunit, dans sa maison de Constantinople, tous ses amis et rédigea avec eux un programme d'opposition. Dans ce programme, les membres de l'Union et Progrès demandaient le retour du gouvernement à Constantinople, l'institution de deux Chambres au lieu d'une et quelques autres points que le tribunal d'indépendance a considérés comme un appel à la révolte contre le régime existant.

Constantinople, 26 août. — Le tribunal de l'Indépendance à Angora, a condamné à mort Djavid bey, ex-ministre des finances ; Nazim bey, ex-ministre de l'instruction publique ; Helmi bey, ancien député d'Ardahan, et Nail bey, ex-secrétaire du parti unioniste. Ils étaient accusés d'avoir conspiré en vue de s'emparer du pouvoir par un attentat.

Ressif bey (il s'agit peut-être de Reouf bey, l'ancien président du conseil) est condamné à la prison perpétuelle.

Tous les fonds du parti jeune-turc seront confisqués."


"Djavid bey ancien ministre turc et trois de ses complices sont condamnés à mort", Le Quotidien, 27 août 1926, p. 3 :


"L'orage passé, les membres du comité Union et Progrès se retrouvèrent à Berlin, où, en 1921, ils fondèrent un comité révolutionnaire mahométan. De là, ils fomentèrent des révoltes en Turquie et Enver rechercha même l'amitié de la Russie, où il se rendit pour travailler à la révolution asiatique.

Le procès d'Angora a établi tous les détails de ces intrigues, a cherché à établir la liaison entre elles et l'attentat contre Kemal. Les accusés appartiennent tous au parti Jeune-Turc. Ce sont Djavid bey, ex-ministre des Finances ; Ahmed Nessimy bey, ex-ministre des Affaires étrangères ; Azmi bey, préfet de police de Constantinople ; Niazim bey, ex-commandant de Monastir ; Hussein Djavid [Djahid] bey, directeur du journal Tanin ; le vieillard de 90 ans Hamdié Baba et une centaine d'employés du comité Union et Progrès.

La seule accusation portée jusqu'ici contre les Jeunes-Turcs est de s'être réunis au domicile de Kara Kemal et de Djavid bey pour s'y concerter sur un programme politique ayant pour principaux articles la restauration de la monarchie et le rétablissement du Kalifat.

Le président du tribunal, tout en reconnaissant que ce programme n'était pas criminel en soi, déclara que sa mise en pratique impliquait nécessairement le crime de haute trahison, passible de la peine de mort.

Tel fut le thème du procès d'Angora qui s'est dénoué par quatre condamnations capitales."


Voir également : L'opposition du Parti républicain progressiste (1924-1925) 

Le contexte de l'abolition du califat en Turquie (1924)

Le triangle Vahdettin-Kemal-Enver dans le contexte du conflit entre l'Entente et la Russie bolcheviste

L'hypothèse d'une collusion Enver-Cemal contre la Russie bolcheviste

 
L'anti-bolchevisme de Kâzım Karabekir et Fevzi Çakmak


Bekir Sami Kunduh : entre racisme anti-arménien et pragmatisme
  
Le panislamisme et le panturquisme de Nuri Paşa (frère d'Enver Paşa)
  
Le Turc Enver Paşa, vu par le Dönme Cavit Bey

La révolution jeune-turque ou l'inextinguible lumière de l'espoir

Les Jeunes-Turcs et les confréries soufies
     
 
Les Jeunes-Turcs et l'alévisme-bektachisme

Le patriotisme ottoman du Comité Union et Progrès (İttihat ve Terakki)