Alexandre Bennigsen et Chantal Lemercier-Quelquejay, Les mouvements nationaux chez les musulmans de Russie avant 1920. La presse et le mouvement national chez les musulmans de Russie avant 1920, Paris-La Haye, Mouton, 1964, p. 222, note 2 :
"Ahmed Zeki Velidi Togan, issu d'une grande famille de l'Ural Méridional, naquit en 1890 dans le village de Kuzen. Fils d'imam, il fit ses études à Kazan à la medresseh Qasymiyeh, puis à l'Université. Très tôt, il se fit remarquer comme historien en collaborant aux journaux Joldyz (1906), Vaqt (1907), Mektep (1913). En 1909, il fut nommé professeur d'histoire et de littérature turques. En 1912, après la publication de son premier travail historique important : Türk ve Tatar tarihi, il devint membre de la Société d'Histoire, d'Archéologie et d'Ethnographie de l'Université de Kazan et effectua pour son compte plusieurs missions scientifiques en Asie Centrale. Au printemps 1916, il fut délégué par le « gouvernement » d'Ufa au Bureau Musulman de la Duma. En mai 1917, il prit part au Ier Congrès des Musulmans de Russie. A partir de ce moment, Zeki Velidi est le leader incontesté du mouvement national baškir : président du Šura régional baškir, président du Gouvernement Baškir, chef de l'Armée baškire, membre et président du Bašrevkom, puis Commissaire à la Guerre de la République Baškire. En juin 1920, après la rupture avec les Soviets, Zeki Velidi se réfugia au Turkestan et prit une part active à la lutte des Basmačis contre le régime soviétique. En 1922, il s'expatria en Afghanistan, puis en Turquie. Il occupe actuellement le poste de Directeur des études historiques à l'Université d'Istanbul. On doit à Zeki Velidi de très nombreux ouvrages d'histoire, dont une partie a été traduite en langues occidentales. Plusieurs études biographiques ont été consacrées à cette remarquable personnalité, parmi lesquelles celle de Herbert Jansky dans Zeki Velidi Togan'a Armağan (Mélanges en hommage à Zeki Velidi Togan), Istanbul, 1955 et l'anonyme « Ahmed Zeki Velidi » dans Die Welt des Islams, t. 14, 1932, pp. 22-25."
Jean-Paul Roux, Histoire des Turcs. Deux mille ans du Pacifique à la Méditerranée, Paris, Fayard, 2000, p. 395-396 :
"Les musulmans de Russie, les Turcs ou Tatars qui en constituent de loin la majeure partie, ont été surpris par la révolution soviétique. Celle-ci a éclaté au terme d'une longue période d'agitation intellectuelle qui les avait poussés tour à tour ou simultanément vers les idéologies socialistes, panislamiques et panturques. Ils ne l'attendaient pas ; ils n'y étaient pas préparés et n'y ont à peu près en rien aidé.
Purement russe ou, si l'on veut, slave, la révolution s'est faite sans eux et continua sans eux, si ce n'est toujours contre eux ou malgré eux. Ils ont dû cependant la subir et ont essayé tout naturellement d'en tirer profit en se donnant, à la hâte et maladroitement, les organes administratifs et militaires susceptibles de leur permettre de défendre leurs revendications. Celles-ci étaient claires et semblaient bien répondre aux idéaux du temps : auto-administration, égalité entre musulmans et chrétiens, restitution des terres spoliées par la colonisation, suppression totale de celle-ci. Leur sentiment profond demeurait anti-russe, mais ne les poussait pas plus vers les Blancs que vers les Rouges qu'ils rallièrent tour à tour par opportunisme. Avec les premiers, dont l'esprit restait colonialiste, les points de désaccord ne tardèrent pas à apparaître. Avec les seconds, ils se manifestèrent aussi, non au plus haut niveau car les autorités soviétiques tenaient à gagner la sympathie des allogènes, mais dans la pratique de la vie quotidienne, les révolutionnaires russes entendant garder pour eux le bénéfice de la révolution. Ils ont donc dû, pour s'en tirer, ne compter que sur eux-mêmes, mais ils n'en avaient pas les moyens. Les mouvements d'indépendance ou d'autonomie ont vite été réprimés.
En novembre 1917, le conseil du peuple musulman avait proclamé à Kokand l'autonomie du Turkestan. Le soviet de Tachkent lance contre lui ses troupes russes qui entrent dans la ville insurgée le 6 février 1918 : elles la mettent à sac, l'incendient et massacrent ses habitants. A Orenbourg, le gouvernement national bachkir, formé en 1917 sous la présidence d'Ahmad Zeki Velidov (ultérieurement connu comme historien, en Turquie, sous le nom de Zeki Velidi Togan), disparaît en février 1918."
"Un nouveau Confrère", Prométhée, n° 8, juin-juillet 1927, p. 37 :
"En même temps que Prométhée se réjouit d'ajouter à la liste des peuples, dont il défend la juste cause, le nom du Turkestan, les patriotes de ce pays ont commencé la publication à Constantinople de leur organe en langue turque qui, d'ailleurs, est la leur. Le Yeni Turkistan est un organe mensuel littéraire, scientifique et politique, grand format, contenant 32 pages.
Le premier numéro qui nous est parvenu contient une série d'articles politiques et des études littéraires. A signaler l'étude de l'historien bachkir, bien connu, M. Ahmed Zaki Velidi, sur la Poésie de Chaïbak Khan, ce prince érudit du Turkestan (XVe siècle) dont les oeuvres sont fort appréciées et dont un recueil de poésies se trouve au British Museum de Londres (...).
Nous félicitons les patriotes turkestanais de leurs efforts et nous souhaitons la prospérité à notre nouveau confrère. Cet organe, ajouté à Eni-Kawkasia, contribuera puissamment à éclairer l'opinion publique en Turquie, hélas, travaillée d'une façon systématique et intense, par la propagande néfaste qu'y font les Soviets."
Voir également : La pensée de Yusuf Akçura
Memmed Emin Resulzade, père fondateur de la République d'Azerbaïdjan
Hamdullah Suphi : "Comment se brisent les idoles"
1916 : le régime de Nicolas II ensanglante le Turkestan dans l'indifférence de l'Angleterre et de la France
Transcaucasie (1918) : les tueries de populations azéries par les forces dachnako-bolchevistes
Les Arméniens (notamment dachnaks), troupes de choc de la dictature bolcheviste en Asie centrale
Histoire des Arméniens : la politique anti-azérie et pro-arménienne du régime bolcheviste
La double oppression des Azéris en Arménie soviétique
Les "opérations nationales" de "nettoyage" des frontières soviétiques (1935-1937)
Sud-Caucase soviétique : les déportations de divers musulmans dans les années 30 et 40
Histoire des Arméniens : les déportations arméno-staliniennes d'Azéris
La déportation des Turcs meskhètes (Ahıska) par Staline
La déportation des Tatars de Crimée par Staline